N’Gatty, village Adjoukrou de près de 4000 mille âmes, situé dans la région des Grands Ponts, s’enfonce davantage dans une grave crise dans laquelle il s’est englué depuis quelques mois. Caractéristiques principales de cette autre crise qui s’accentue, la présence de deux chefs au sein du même village situé dans le périmètre communal de la ville de Dabou, à 27 kilomètres d’Abidjan.
Tous les deux chefs qui revendiquent la gouvernance du village de N’Gatty, ironie du sort, sont issus du même clan générationnel baptisé « Ebebou » qui sont les patriarches gouvernants en symbiose avec les autres classes d’âge. En effet, alors qu’un chef du village est déjà en poste depuis mai 2023 en la personne d’Akpa Sié André, à la suite d’une consultation populaire pilotée par le sous-préfet de Dabou ; une surprise survient, le samedi 16 mars 2024, dans ledit village. En effet, la génération détenant le pouvoir exécutif, lors d’une assemblée générale du village, démet, le chef en exercice le nommé Akpa Sié André et le remplace de façon intérimaire par le doyen d’âge de la génération des patriarches au pouvoir. A savoir Albert Danho Sié, gardien de la sécurité, selon les us et coutumes de la contrée.
Le samedi 16 mars 2024, la place publique qui abritait cette réunion de destitution était pleine de monde au moment où notre équipe de reportage foulait le sol de ce village presque entouré de la lagune Ebrié. Il était 17 h GMT. Tout de suite, nous constatons qu’effectivement deux clans s’affrontent dans ce village pour le contrôle de la chefferie traditionnelle. Devant cette assemblée du village, le secrétaire général des patriarches gouvernants expose les causes profondes qui ont conduit, selon lui, à la mise à l’écart du nouveau chef Akpa Sié André.
Auparavant Ferdinand Dogni Dadé avait eu une longue conversation avec les membres du clan générationnel au pouvoir sur les causes du limogeage d’Akpa Sié André. Dont le limogeage a visiblement été approuvé par l’assemblée présente au regard des applaudissements nourris et des prises de parole après l’exposé du l’intervenant principal.
Le chef Akpa Sié André est accusé de mauvaise gestion des affaires du village de N’Gatty. Un véritable réquisitoire a été fait contre ce dernier. « Notre chef Akpa se met aux côtés des anciens dirigeants qui ont pourtant été chassés par l’administration et et nous, la génération au pouvoir pour mandat illégal et gestion catastrophique. Contre toute attente, il se range aujourd’hui aux côtés de ces derniers qui n’ont jamais rendu compte de leur gestion passée pour prendre des engagements n’importe comment au nom du village. Alors on ne le reconnait plus car il a trahi le village. La classe d’âge au pouvoir estime qu’il a pénalisé le village par une gestion solitaire et illicite. Il marchande ses signatures d’attestation. Nous l’accusons de trahison et de parjure. Comme si cela ne suffisait pas, il utilise aujourd’hui des pratiques occultes pour tenter de nous nuire. C’est pourquoi nous avons recouru à sa destitution. Nous l’avons interpellé pus d’une fois mais rien n’y fit », a expliqué Ferdinand Dogni Dadé devant une foule acquise à sa cause.
Mais le secrétaire général des patriarches gouvernants ne s’arrête pas là. Il donne l’alerte sur les conséquences qui pourraient découler d’un tel imbroglio si l’administration préfectorale ne prend pas la peine de réagir après sa saisine déjà opérée. Surtout que le chef destitué oppose de la résistance, selon lui, en continuant de poser des actes au nom du village. « L’administration ne doit pas attendre que l’irréparable se produise avant de lever le petit doigt. C’est maintenant qu’il faut agir », prévient Ferdinand Dogni Dadé.
Du côté du chef du village Akpa Sié André déchu par les « Ebebou » mais qui dit ne pas se considéré comme démis, l’attitude est apparemment à la sérénité. Puisque joint par téléphone, le dimanche 17 mars 2024, il nous a affirmé qu’il a la loi avec lui. « J’ai mon arrêté préfectoral qui fait ma force. Mes détracteurs sont jaloux de moi parce que j’ai entamé la construction de ma résidence. Je suis là pour la paix, c’est pourquoi je travaille avec les anciens dirigeants. Quand j’ai été convoqué un jour par ceux qui me traitent de tous les noms d’oiseaux, ils m’ont copieusement insulté. C’est pourquoi j’ai rompu avec eux », se défend Akpa Sié André qui devrait organiser, le dimanche 18 mars 2024, son assemblée générale de réplique sur la même place publique de N’Gatty.
Félix Teha-Dessrait
Envoyé spécial au village de N’Gatty (Dabou)
Légende photo : Albert Danho Sié, nouveau chef de village intérimaire de N’Gatty désigné et présenté, le samedi 16 mars 2024, par les patriarches gouvernants. Preuve que la crise se durcit dans le village.
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