Le vendredi 19 mai 2023, Karim Khan, le procureur de la Cour pénale internationale (CPI), a été placé sur la liste des personnes recherchées en Russie, selon une notice publiée par le ministère de l’Intérieur de la Fédération de Russie.
Cet acte judiciaire de la Russie constitue une réponse au mandat d’arrêt lancé , le 17 mars 2023, par la Cour pénale internationale contre le président russe, pour sa responsabilité, selon la CPI, dans des crimes de guerre en Ukraine. « Date de naissance : 30 mars 1970. Lieu de naissance : Edimbourg, Ecosse […] Recherché en vertu d’un article du code pénal », indique la notice contre le procureur de la CPI émise par les autorités russes et que des journalistes de l’AFP ont consultée.
Au dire de ces journalistes, la notice ne mentionnait aucune précision sur la nature de l’infraction. La CPI a jugé, le samedi 20 mai 2023, la démarche de la Russie « inacceptable » et a ajouté, dans un communiqué, qu’elle « restera inflexible dans l’exécution de son mandat légal, garantissant que des comptes soient rendus pour les crimes les plus graves ».
A noter qu’à la mi-mars, quelques jours après le mandat de la CPI contre Vladimir Poutine, Moscou avait déjà ouvert une enquête pénale contre Karim Khan et trois juges de la CPI. Selon cette investigation, le procureur international est accusé d’avoir « engagé des poursuites pénales à l’encontre d’une personne notoirement innocente » et de « préparer une attaque envers un représentant d’un Etat étranger ». De son côté la CPI, basée à La Haye aux Pays-Bas, accuse le président russe de crimes de guerre pour la « déportation illégale » de milliers d’enfants ukrainiens, dans le cadre du conflit entre Moscou et Kiev.
Ce type de mandat d’arrêt doit normalement être tenu secret. Mais la CPI a décidé de le dévoiler, arguant dans sa décision, notamment, « que la connaissance publique des mandats peut contribuer à la prévention de la commission d’autres crimes ». A l’époque, le président ukrainien Volodymyr Zelensky a qualifié la démarche judiciaire de la CPI d’« historique » et le président américain Joe Biden de « justifié ».A contrario, les autorités russes ont qualifié ce mandat d’arrêt de « nul et non avenu ». Argument martelé par le Kremlin : la fédération de Russie n’est pas membre de la CPI et elle ne reconnaît donc pas la compétence de ce tribunal.
Dans l’opinion internationale surtout au sein des pays du tiers-monde et des pays non-occidentaux, la Cour pénale internationale (CPI) est perçue comme un tribunal aux ordres des pays occidentaux et qui protège les dirigeants de ces pays-là mais s’acharne sur les dirigeants ayant des rapports tendus avec l’Occident. Des questions et des réponses qui vont ici nous permettre de mieux cerner cette Cour.
1-Quelle est la différence entre la CPI et une Cour ordinaire ?
Le 17 juillet 1998, 120 États ont adopté à Rome le Statut – le Statut de Rome de la Cour pénale internationale – instituant la Cour pénale internationale (CPI). La CPI a été créée en 2002 pour juger les pires crimes commis dans le monde. A ce jour, 123 pays en sont membres.
Pour la première fois dans l’histoire de l’humanité, des États ont décidé d’accepter la compétence d’une cour pénale internationale permanente, chargée de poursuivre les crimes les plus graves commis sur leur territoire ou par leurs ressortissants, à compter de l’entrée en vigueur du Statut de Rome, le 1er juillet 2002. La Cour pénale internationale ne remplace pas les tribunaux nationaux. Le Statut de Rome rappelle que chaque État a le devoir d’exercer sa compétence pénale vis-à-vis des responsables de crimes internationaux.
La Cour ne peut intervenir que dans le cas où un État est dans l’incapacité ou n’a pas la volonté de mener véritablement à bien des enquêtes et de traduire en justice les auteurs de crimes. La finalité première de la Cour est d’aider à mettre un terme à l’impunité des auteurs des crimes les plus graves touchant l’ensemble de la communauté internationale, et de contribuer ainsi à leur prévention. Mais la CPI le fait-il en vérité ? Est-elle une juridiction qui met tous les pays du monde et tous les ressortissants des différents pays de la planète sur le même pied d’égalité ? Plusieurs raisons nous permettent d’en douter profondément.
2- Existe-t-il une organisation qui contrôle le monde ?
L’ONU née après la seconde guerre mondiale était censée être l’organisation qui s’impose à tous les pays du monde malheureusement elle se trouve aujourd’hui fortement affaiblie. On se souvient qu’en 2003, c’est en dépit de l’opposition de certains membres du Conseil de sécurité dont des pays ayant le droit de veto comme la France que les Etats-Unis ont envahi l’Irak , tué l’ancien président
Saddam Hussein et totalement détruit ce pays. Qui aujourd’hui demeure un nid d’instabilité en proie au terrorisme. C’est pareil pour la Lybie en 2011.L’O NU était incapable de dire « non » à la guerre de l’OTAN et de la France contre
Mouammar Kadhafi qui a été assassiné par les services secrets français et la
Lybie est aujourd’hui un pays sans Etat. Face visiblement à l’incapacité de l’ONU de régenter le monde, la Cour pénale internationale voudrait s’y mettre pour contrôler le monde. La CPI ne peut pas le faire parce qu’elle n’est pas reconnue par tous les pays du monde. Certaines puissances telles que les Etats
Unis d’Amérique ne veulent même pas entendre parler d’elle. Autre tare de la CPI, c’est qu’elle est perçue par les pays en voie de développement comme les pays africains comme une juridiction faite pour punir les ressortissants africains uniquement ainsi que ceux des autres pays non-développés. A leurs yeux , la CPI est donc une juridiction qui promeut l’injustice.
3- La nationalité du procureur et des juges actuels de la CPI
Le nouveau procureur de la Cour pénale internationale (CPI) se nomme Karim A. A. Khan, c’est un ressortissant du Royaume Uni. Il a été à ce poste, le 12 février 2021, à l’occasion de la 19e session de l’Assemblée des États parties au Statut de Rome qui s’est tenue à New York. M. Khan a prêté serment le 16 juin 2021.Le procureur Karim Khan KC est assisté de deux procureurs adjoints qui sont Mame Mandiaye Niang (Sénégal) et Nazhat Shameem Khan (Fidji).
La Cour pénale internationale (CPI) compte 18 juges, lesquels sont élus pour un mandat de neuf ans par l’Assemblée des États parties (AEP) au Statut de Rome, l’instrument constitutif de la Cour. Les juges ne peuvent pas être réélus. La majorité des 18 juges sont originaires des pays occidentaux. Il s’agit là d’une anomalie puisque la CPI a pour vocation de toucher toutes les parties du monde donc la composition des juges devrait refléter cela.
4- Qui est derrière l’idée de la création de la CPI ?
En 1872, Gustave Moynier, membre du Comité international de la Croix-Rouge, propose de créer un tribunal qui serait compétent pour certaines violations du droit international humanitaire, par exemple celles issues de la 1e Convention de Genève de 1864 .Cette idée, novatrice pour l’époque et liée aux répercussions traumatiques de la guerre franco-prussienne de 1870, est doublée de celle d’ordonner la réparation des dommages y afférents7. Toutefois, elle n’est pas concrétisée.
Mais historiquement, on pourrait affirmer que l’idée de la création de la CPI vient du 19e siècle en Occident. Il faut préciser qu’à cette époque, l’esclavage avait cours. Mais les violations des droits humains qui préoccupaient les pays occidentaux n’étaient ceux perpétrés sur les esclaves. Tout comme plus tard, le colonialisme et ses barbaries n’ont pas été épinglés par les juridictions nationales des pays occidentaux. Aujourd’hui, le néo-colonialisme et ses graves violations des droits humains en Afrique sont totalement ignorés par la CPI.
5- Les Africains ont-ils intérêt à coopérer avec la CPI ?
Au regard des agissements de la Cour pénale internationale qui visiblement semble avoir été créée pour punir les seuls Africains, les pays du continent sont-ils tenus de continuer à coopérer avec cette Cour nnn On peut sans hésiter affirmer « non ». Les pays africains devraient agir comme les Etats-Unis d’Amérique qui ont clairement décidé de ne pas se soumettre à la CPI.
6- La CPI est-elle efficace ?
Cette question est fondamentale. De nombreux observateurs estiment que cette juridiction internationale est inefficace pour deux raisons essentielles. D’une part parce qu’elle assujettie par les pays d’une partie du monde c’est-à-dire les pays occidentaux, ce qui pose le problème crucial de son indépendance et de son professionnalisme. D’autre part , parce qu’elle n’ose pas s’en prendre aux ressortissants de certains pays jugés intouchables tels que les Etats-Unis.
Par Nedson Djinsou
Laissez une réponse