Guédou Elie Ousmane, Directeur général : « La MATCA a relevé deux grands défis »

 

Le Directeur général de la Mutuelle d’assurance des taxis compteurs d’Abidjan (MATCA), Guédou Elie Ousmane, retrace, dans cette interview, les grandes lignes de son action à la tête de la structure. Reconduit au poste de Directeur général, il jette un regard rétrospectif sur le travail abattu depuis plusieurs années.

Monsieur le Directeur général, que peut-on retenir de la MATCA et ses principales missions ?

Guédou Eli Ousmane : La MATCA est la Mutuelle d’assurance des taxis compteurs d’Abidjan. C’est une entreprise à forme mutuelle, à cotisation variable et régie par le code CIMA. A l’origine, les taxis compteurs étaient assurés par toutes les compagnies d’assurances. A partir de 1988, les assurances ont constaté un taux de sinistralité très élevé qui ne leur permettait plus de couvrir les risques. Ils ont décidé alors d’augmenter les primes d’assurances. Les transporteurs ont refusé cette augmentation de prime et ont décidé de paralyser la ville d’Abidjan. C’est donc pour mettre fin à cette crise sans précédent que l’Association des sociétés d’assurances de Côte d’Ivoire (ASA-CI) a proposé au ministre de l’Economie et des Finances d’alors, la création d’une mutuelle d’assurance des taxis compteurs. C’est ainsi que la MATCA a été créée le 31 octobre 1989 avec un Fonds d’établissement de 200 millions Fcfa dont 150 millions Fcfa remis par l’ASA-CI sous forme de prêt remboursable. Quant à la mission principale de la MATCA, elle consiste à couvrir les risques liés aux taxis compteurs par un contrat d’assurance et d’indemniser les victimes.

 Vous avez initié une opération de décentralisation de la MATCA, quel bilan pouvez-vous en faire ? Pouvons-nous également connaître quelques-uns de vos succès depuis votre arrivée à la tête de la société ?

Avant de me prononcer sur la politique de la décentralisation de la MATCA, je voudrais faire un état des lieux. Depuis sa création, notre mutuelle a connu trois grands épisodes qu’il est bien de rappeler. D’abord, de sa création en 1989 jusqu’en 1999, soit dix années qui correspondent à une période de mise en place des fondamentaux d’une compagnie d’assurance. La plupart des réalisations ont été faites durant cette période. Ensuite, de 1999 à 2009, nous avons assisté à dix années de crise qui ont suscité une instabilité à la MATCA, au point où la CIMA envisageait le retrait de l’agrément, n’eut-été l’arrivée de l’équipe actuelle. Enfin, de 2009 à 2021, la mutuelle a renoué avec la stabilité qui lui a permis de passer d’une zone rouge à une zone totalement verte avec d’énormes progrès.

C’est cette période de stabilité retrouvée qui a vu naitre la politique de décentralisation qui n’est autre chose que de rapprocher la mutuelle de ses mutualistes en créant des agences MATCA dans chaque commune du District autonome d’Abidjan. Je voudrais rappeler avant tout que la MATCA est une compagnie d’assurance. Donc un établissement financier qui a sa clientèle éparpillée sur tout le District Autonome d’Abidjan. Pendant 25 ans, elle n’avait que deux agences situées dans la commune du Plateau. Les sociétaires, quel que soit leur commune de résidence, étaient obligés de se rendre au Plateau pour s’acquitter de leur police d’assurance. Nos caisses étaient constamment assaillies de monde et beaucoup de sociétaires perdaient inutilement le temps dans d’interminables files d’attente. Nous avons jugé cette situation anormale. Vous savez, le rôle d’une mutuelle, c’est de faciliter les conditions de vie et de travail à ses mutualistes. C’est pourquoi nous avons initié, dès notre nomination en 2014, la politique de décentralisation de nos services avec pour objectif une nouvelle agence tous les deux ans. Ainsi avons-nous successivement ouvert l’agence Prestige de Treichville en 2016, l’agence des Deux Plateaux Vallons en 2017, l’agence Saphyr de Yopougon en 2018, l’agence Emeraude d’Abobo en 2019 et l’agence de Koumassi en 2021.

C’est le lieu de rappeler que jusqu’ici le traitement des sinistres se fait uniquement au siège au Plateau. Mais dans les mois à venir, le service sinistres sera déployé dans toutes les agences et les sociétaires pourront désormais faire leurs déclarations de sinistres dans les agences de leur choix.

En dehors de la politique de décentralisation, nous avons à notre actif beaucoup d’autres succès, notamment la mise en place du service de dépannage et de remorquage des taxis compteurs à des coûts défiant toute concurrence, soit 10.000 fcfa au lieu de 86.000 fcfa pratiqués par le passé. La création de MATCA TRACES pour la géolocalisation des taxis, la sécurité des taxis ainsi que des passagers…. Le règlement rapide et efficient des sinistres, car la raison de vie d’une compagnie d’assurance est de régler les sinistres. De 1 milliard fcfa de prévision annuelle de règlement, nous sommes passés à plus de 2 milliards 629 millions fcfa chaque année. Pour rappel, la MATCA ne payait que 400 millions fcfa de sinistres avant la mise en place de cette politique. Il est à noter, par ailleurs, que toutes ces réformes ont été possibles grâce à la politique générale de l’équipe dirigeante actuelle dénommée « MATCA NOUVELLE VERSION », qui a conduit la mutuelle à la certification ISO 9001 Version 2015.

 

Justement que représente la certification pour vous ?

La certification est la reconnaissance de l’utilisation des bonnes pratiques dans notre domaine d’activité, aussi bien au plan national qu’international. Et pour nous, c’est une grande fierté d’atteindre ce niveau de management après tout ce que la MATCA a traversé comme difficultés. Sur 39 compagnies d’assurance et de réassurance, seulement quatre ont été certifiées y compris la MATCA. Parmi les mutuelles, la MATCA est la première mutuelle d’assurance certifiée dans l’espace CIMA. Pour nous, la certification ISO 9001 Version 2015 est la matérialisation du travail ben accompli car notre ambition est de devenir une entreprise moderne et modèle avec une performance continue. Je voudrais également profiter pour rendre un hommage au président du conseil d’administration, Monsieur Faman Touré, qui a toujours soutenu toutes nos initiatives. Je voudrais également remercier et féliciter l’ensemble de mes collaborateurs qui ont épousé cette passion et contribué à transformer notre rêve en une réalité aujourd’hui.

Le parc des taxis compteurs est vieillissant, qu’avez-vous fait pour son renouvellement ?

 Effectivement le parc automobile est très vieillissant et cela nous préoccupe énormément même si nos statuts ne nous permettent pas de procéder directement au renouvellement en tant que compagnie d’assurance. Pour ce faire, nous avons proposé et suscité des actions, notamment au niveau des pouvoirs publics tels que le projet TAXIS IVOIRE initié par l’Etat de Côte d’Ivoire et piloté par le Fonds de développement des transports routier (FDTR). Nous continuons d’encourager des initiatives privées dans ce sens et nous pouvons parfois servir de caution morale pour certaines structures fiables qui ambitionnent le renouvellement du parc automobile.

C’est ainsi que nous avons encouragé l’organisation de la corporation du taxi compteur par la création d’une fédération des structures de propriétaires afin d’avoir un interlocuteur crédible. Cette fédération dénommée FIPETCA (Fédération Ivoirienne du patronat et des exploitants de taxis compteurs d’Abidjan) a été mise en place en 2020. Et son premier grand projet a été justement le renouvellement du parc automobile des taxis compteurs. Elle a entrepris plusieurs démarches qui ont abouti à la signature d’une convention, le 23 juillet 2021, entre la MATCA, la FIPETCA, CREDAFRICA et le consortium GDG pour le renouvellement du parc auto à hauteur de 5000 véhicules en 5 ans, à raison de 1000 véhicules par an. Et à l’heure où nous parlons, les premiers véhicules pour les tests sont déjà disponibles et les structures membres de la FIPETCA sont actuellement en train de les essayer afin de faire leurs observations et y apporter d’éventuelles modifications.

 

 

Quels sont les principaux acquis de la MATCA et les innovations majeures apportées par votre équipe ?

 La MATCA faisait face à deux grands défis qui sont le règlement des sinistres avec diligence et la baisse de la prime d’assurance. A ce jour, nous nous réjouissons d’avoir relevé ces deux grands défis. En ce qui concerne le premier défi, nos sociétaires sont satisfaits du règlement de leurs sinistres par rapport à ce qui avait court par le passé, et nous  comptons améliorer davantage le montant du règlement  des sinistres par an selon nos prévisions futures. Pour l’exercice 2020, malgré la crise sanitaire qui a impacté notre domaine d’activité, nous avons payé les sinistres à hauteur de 2 milliards 600 millions fcfa.

En ce qui concerne la baisse de la prime d’assurance, la MATCA a innové en supportant certaines charges à la place des sociétaires afin d’éviter d’autres augmentations de primes. Il en est ainsi, par exemple, de la décision étatique d’augmentation du tarif automobile relativement à la mise en place du Fonds de garantie automobile (FGA). La prime d’assurance devait donc passer de 40.000 fcfa à 42.700 fcfa. Mais la MATCA a préféré supporter les 2700 fcfa pour éviter aux sociétaires de connaitre une augmentation de prime.

Aussi pour soulager nos sociétaires qui avaient d’énormes problèmes avec la SOAD lorsqu’ils faisaient des pannes sur la voie publique, nous avons mis en place un service de dépannage et de remorquage dénommé « MATCA DEPANNAGE ». Leurs véhicules étaient déposés dans la fourrière de la SOAD à 86.000 fcfa et ils devaient par la suite louer une remorqueuse pour l’enlèvement de la fourrière à leurs garages. Avec MATCA DEPANNAGE, leurs véhicules sont remorqués à seulement 10.000 fcfa et les véhicules sont déposés directement dans leurs garages. C’est une innovation de taille qui fait aussi la fierté de nos sociétaires.

Le calme règne désormais à la MATCA. Peut-on affirmer sans risque de se tromper que les crises sont de vieux souvenirs ?

Oui, nous pouvons affirmer que la MATCA est dans une nouvelle dynamique et que les dix années de crise qu’elle a connues entre 1999 et 2009 sont totalement derrière elle. Mais il nous a fallu dix ans pour réaliser cela et pendant ces dix ans, nous avons pris soin d’asseoir les bases d’une stabilité durable à travers notre politique « MATCA NOUVELLE VISION ».

Nous constatons depuis quelque temps que toutes les agences MATCA sont équipées d’écrans. A quoi répond cette innovation ?

Notre objectif reste la satisfaction continue de notre clientèle. Depuis quelques années, nous avons multiplié nos outils de communication parce que nous souhaitons être le plus proche possible de nos sociétaires. Nous éditons de façon trimestrielle un magazine dénommé « ECHOS MATCA » que nous mettons gratuitement à leur disposition et au travers duquel ils sont informés sur la vie de leur mutuelle. Mieux, nous avons créé un compte Facebook « MATCA Assur ». Par ce canal, ils peuvent exprimer directement leurs préoccupations et leurs attentes. Pour ceux qui ne sont pas familiers du digital, nous avons mis en place deux lignes téléphoniques dédiées à l’écoute client. Il s’agit du 27 20 30 06 89 et du 98138 qui est un numéro vert. Sans compter que sur notre site internet, nous avons ouvert une fenêtre dédiée à l’écoute client pour enregistrer leurs préoccupations.

Dans l’optique de communiquer de façon efficiente avec nos sociétaires, nous avons mis en place des applications audiovisuelles sur You Tube, notamment MATCA TV et RADIO MATCA. Mais comme nous savons que ce ne sont pas tous les sociétaires qui sont coutumiers des plateformes numériques, nous avons pensé à un autre relais de communication. Ce sont donc les écrans dynamiques que vous voyez aujourd’hui dans toutes nos agences. Chaque fois que le sociétaire va prendre son assurance, il est informé sur ces écrans, de la vie de sa mutuelle.

 

Le secteur des transports a été fortement impacté par la covid- 19. Comment avez-vous surmonté cette difficulté ?

Effectivement, l’année 2020 a été une année difficile pour notre secteur d’activité. Toutefois il faut noter que la MATCA a pris très tôt les dispositions utiles dès le déclenchement de cette crise sanitaire. Tout d’abord, elle a équipé toutes ses agences de thermomètre à laser, savon liquide, gel hydro- alcoolique et de toute la logistique qui accompagne le lavage des mains. Ensuite elle a procédé à la distribution gratuite de cache-nez aux sociétaires. Et pour terminer, la MATCA a procédé, avec l’appui du District Autonome d’Abidjan, à la désinfection systématique de tous les taxis compteurs, à l’effet de protéger aussi bien les conducteurs que les passagers. La conjugaison de toutes ces actions ainsi que le respect des mesures barrières dans nos agences ont assuré une protection optimale à nos agents et nos clients.

Faman Touré, PCA de la Matca

Quelle est votre ambition pour la MATCA dans le secteur des assurances en Côte d’Ivoire ?

Notre ambition, c’est de faire de la MATCA une entreprise moderne et modèle. Nous sommes un exemple unique dans l’espace CIMA, nous voulons donc devenir un modèle de référence pour les autres pays de cet espace. Nous pensons que d’ici quelques années, notre mutuelle sera une entreprise émergente dans un pays d’économie émergente. Pour terminer, je voudrais exprimer toute ma gratitude au conseil d’administration de la MATCA et à son président monsieur Faman Touré qui ont cru en nous en nous nommant à ce poste de responsabilité. Je voudrais partager avec eux la joie et la reconnaissance de nos sociétaires, qui ont pu bénéficier grâce à leur esprit d’innovation et au dynamisme du conseil d’administration, de tous ces projets dont nous venons de parler. Certains projets ont connu un début de réalisation dont notamment la construction de la centrale d’achats, le projet immobilier dénommé « cité Kassoum Coulibaly » et la chaine de radio MATCA FM. Dans quelques années nous procéderons avec joie à leurs différentes inaugurations. Aux sociétaires, je voudrais demander de faire confiance à la MATCA et à ses dirigeants.

Interview réalisée

par La Rédaction

 

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