Côte d’Ivoire / CAN 2024 –  6 stades, 6 dénominations, 6 hommages mérités

La 14e édition de la Coupe d’Afrique des nations (CAN) de football s’est déroulée en Côte d’Ivoire du 4 au 14 mars 1984. Pour ceux qui ont été témoins de cet événement, dont votre serviteur, ce fut une véritable fête du football mais également une célébration du brassage des peuples voulue par le président Félix Houphouët-Boigny (paix à son âme).

En dépit de son écrasante victoire (3 à 0) face au Togo, dans un nouveau stade Félix Houphouët-Boigny archi-comble où nous avions eu du mal à trouver une place assise pendant une trentaine de minutes après le début du match, les Eléphants de Côte d’Ivoire n’ont pu remporter le trophée qui a échu au Cameroun de Théophile Abéga, élu au demeurant meilleur joueur du tournoi. Ce fut la première CAN remportée par le pays de Paul Biya.

Il a fallu attendre 1992 au Sénégal pour que la Côte d’Ivoire remporte sa première CAN puis 2015 en Guinée Equatoriale pour le deuxième triomphe à la Coupe d’Afrique des nations de football. Les deux triomphes de la Côte d’Ivoire se sont déroulés ; l’un sous le président Félix Houphouët-Boigny, premier « capitaine » des Eléphants-footballeurs, l’autre sous le président Alassane Ouattara, nouveau « capitaine »  des Eléphants. 

Si le plus grand stade de la ville d’Abidjan qui a abrité le match d’ouverture de la CAN 1984 porte le nom de Félix Houphouët-Boigny, le stade olympique d’Ebimpé (Abidjan) qui accueillera la rencontre d’ouverture de la deuxième CAN en Côte d’Ivoire en 2024 a été baptisé, à juste titre, du nom d’Alassane Ouattara. Ces deux hommages rendus à ces deux chefs d’Etat sont largement mérités. Pour deux raisons fondamentales :

ils ont d’une part, permis chacun aux Eléphants-footballeurs de remporter, sous leur encadrement, une coupe d’Afrique des nations ; d’autre part, ils sont tous deux de grands bâtisseurs de la Côte d’Ivoire.  Félix Houphouët-Boigny en précurseur, Alassane Ouattara en continuateur.

De Charles konan Banny à Amadou Gon Coulibaly 

En plus du stade Félix Houphouët-Boigny d’Abidjan-Plateau (qui fait majestueusement peau neuve) et le stade olympique Alassane Ouattara d’Ebimpé (Abidjan) qui abriteront certains matchs de la CAN 2024, quatre autres stades verront d’autres matchs s’y disputer. Il s’agit des stades de Yamoussoukro, Bouaké, Korhogo et San-Pédro. La capitale politique de la Côte d’Ivoire, Yamoussoukro, la ville natale de feu Félix Houphouët-Boigny, possède désormais un stade à la hauteur de son importance.

Ce stade porte le nom de Charles Konan Banny, un illustre fils de Yamoussoukro et de la Côte d’Ivoire. Ancien Premier ministre, ex-Gouverneur de la BCEAO et ancien président de la Commission dialogue, vérité et réconciliation (CDVR), il a activement contribué au rayonnement de la Côte d’Ivoire  à l’extérieur et apporté sa part dans la normalisation de la vie sociopolitique du pays après la rébellion armée de 2002 et la crise post-électorale de 2010-2011. Victime de la covid-19, il est décédé le 10 septembre 2021 à Paris (France). En donnant son nom au stade de Yamoussoukro, les autorités ivoiriennes lui ont rendu un hommage à la fois vibrant et mérité.

Même son de cloche pour l’ancien Premier ministre Amadou Gon Coulibaly appelé affectueusement « Le lion » pour son courage politique et son abnégation au travail. Il est d’ailleurs mort à la tâche puisque c’est juste après un conseil des ministres qu’il s’est éteint, le mercredi 8 juillet 2020. Le stade de la ville de Korhogo, capitale du Nord de la Côte d’Ivoire, porte le nom de cet autre illustre fils de notre pays.

Fidèle collaborateur du président Alassane Ouattara, Amadou Gon Coulibaly avait été désigné par le parti au pouvoir, le Rassemblement des Houphouétistes pour la démocratie et la paix (RHDP), comme le candidat à l’élection présidentielle d’octobre 2020 donc successeur du président Ouattara en cas de victoire, quand contre toute attente, il est décédé.  Petit-fils du vénéré défunt patriarche du nord de la Côte d’ivoire, Péléforo Gon Coulibaly, l’ex-Premier ministre Amadou Gon Coulibaly était également maire de Korhogo où il a entrepris de nombreux projets de développement.  Faisant de cette bourgade du Nord, une ville rayonnante.

L’homme d’Asmara et ses 5 buts en 20 minutes

A l’instar d’Amadou Gon Coulibaly, l’ancien célèbre footballeur Laurent Pokou, décédé le 13 novembre 2016 à Abidjan, a été également honoré par la Côte d’Ivoire. Les autorités ont décidé de baptiser le stade de San-Pedro, deuxième ville portuaire du pays, du nom de Laurent Pokou.  « Le stade San Pedro prendra le nom d’une ancienne gloire du football qui a marqué la Coupe d’Afrique des nations et qui a porté haut le flambeau de notre pays, l’homme d’Asmara : Laurent Pokou.

Ainsi, le président Ouattara rend hommage à deux dignitaires du développement et de la promotion de l’image de la Côte d’Ivoire et donne des repères aux jeunes générations qui ont besoin, plus que jamais, d’avoir des hommes de qualité comme référentiels », a confié le ministre ivoirien des sports, Paulin Danho, à mes confrères de la radio française, RFI.  Vedette des Eléphants-footballeurs des années 70, Laurent Pokou a émerveillé le continent africain par son talent. Au point où la presse l’a surnommé « l’homme d’Asmara ».

En effet, la CAN de 1970 se déroulait en Ethiopie. Les Eléphants de Côte d’Ivoire étaient dans une poule qui disputait ses matchs dans la ville d’Asmara. Aujourd’hui, Asmara est la capitale de l’Erythrée qui ne fait plus partie de l’Ethiopie. Opposée au Soudan lors du dernier match de poule, la Côte d’Ivoire a obtenu sa qualification grâce à l’exploit de son feu follet Laurent Pokou entré à 20 minutes de la fin du match. Il a inscrit 5 buts et occasionné le 6e but. Ce qui a permis à la Côte d’Ivoire de battre le Soudan par le score sans appel de 6 à 1.

Dernier stade portant un nom révélateur, c’est celui de Bouaké, la capitale du Centre de la Côte d’Ivoire. Ce stade flambant neuf est baptisé « Stade de la Paix ». Le chef de l’Etat Alassane Ouattara et le gouvernement ont voulu ainsi rendre hommage à cette ville martyre qui a abrité, le 10 juillet 2007, la cérémonie historique de « La flamme de la paix ».

En présence du chef de l’Etat d’alors Laurent Gbagbo et du Premier ministre de cette époque, Guillaume Soro, SG des Forces nouvelles (ex-rébellion armée), Bouaké, place forte des ex-rebelles, a été le théâtre d’une cérémonie de destruction d’armes par le feu, censée donner le coup d’envoi au processus de désarmement. 17 ans après cette cérémonie, la ville de Bouaké qui a profondément changé et a renoué avec la paix va vibrer en janvier-février 2024 au rythme de la Coupe d’Afrique des nations. 6 stades, 6 noms et 6 hommages mérités qui traduisent le profond intérêt que revêt pour la Cote d’Ivoire, sa deuxième CAN. Au-delà des symboles.

Didier Depry   

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