Dans cette interview exclusive qu’il nous a accordée, le Président du conseil de gestion (PCG) du Bureau ivoirien du droit d’auteur (BURIDA),Tiburce Koffi, par ailleurs, écrivain et artiste-musicien de talent, nous parle à cœur ouvert. Il lève le voile sur l’état de la structure qu’il dirige avec le Directeur général, Karim Ouattara ; il évoque ses relations avec les sociétaires, répond aux récriminations contre le BURIDA et accuse.
Le Monde Actuel : Vous avez été nommé président du Conseil de gestion (PCG) du BURIDA, le lundi 3 février 2020. Dans quel état avez-vous trouvé l’institution, il y a quatre ans, et quel bilan pouvez-vous dresser aujourd’hui de votre gestion ?
Tiburce Koffi : Bilan ? Ce n’est sûrement pas dans un journal que je vais faire le bilan de notre gestion du BURIDA. Ce n’est pas mon travail, c’est le travail de toute une équipe. S’il est bon, c’est toute l’équipe qu’il faudra féliciter, je ne l’assumerai seul que s’il est mauvais. Ce qu’il faut retenir, c’est que c’était une société en état de délabrement relationnel et administratif que nous avons trouvée. Le plus choquant, c’était les propos injurieux et intolérables. Bien évidemment, la situation financière n’était pas des plus heureuse ; mais ce n’était pas là à vrai dire, la faute de ceux qui dirigeaient la maison. Le climat général de tensions et de querelles avait altéré le rendement de la boite.
Quelles difficultés rencontrez-vous aujourd’hui ?
Coté redressement de la maison et gestion administrative, aucune difficulté ne contrarie mon travail, surtout que le chef de l’administration du BURIDA, celui donc qui tient en mains l’opérationnel, c’est le DG en la personne de Karim Ouattara et non le Président de conseil du gestion (PCG). Dans les faits, mon rôle est d’évaluer et d’apprécier par satisfécit ou par désapprobation les actes de gestion posés par la Direction. Mais le conseil a plus souvent adressé les satisfécits qu’exprimer les désaccords. C’est vous dire la qualité de l’ambiance qui règne aujourd’hui au BURIDA.
« Le Conseil a plus souvent adressé les satisfécits qu’exprimer les désaccords »
De nombreux artistes se plaignent du BURIDA. Certains affirment n’avoir jamais perçu leurs droits. D’autres soutiennent que leurs droits sont mal calculés. Que répondez-vous à ces accusations ?
Trois problèmes en une question : vous dites que de nombreux artistes se plaignent du BURIDA. Je vous réponds : ceux qui aujourd’hui sont contents du BURIDA sont plus nombreux que ceux qui ne le sont pas. Et les plaintes d’artistes, il y en aura toujours. Il ne faut pas croire que Dieu est pénard au paradis. Je suis prêt à parier qu’il y a là-bas des syndicats de mécontents contre Lui. Il est de la nature des masses de ne se sentir jamais satisfaites à cent pour cent. En réalité, le BURIDA reste une nébuleuse pour nombre d’artistes et même de sociétaires. Ils sont très nombreux les artistes non sociétaires du BURIDA c’est-à-dire des gens qui n’ont jamais adhéré à la société et qui donc n’ont pas de carte. Mais ils estiment que, parce qu’ils pratiquent un art, le BURIDA doit leur donner de l’argent de façon périodique. C’est une désolante méprise.
Il y a des artistes sociétaires, auteurs d’œuvres musicales, dramatiques, littéraires, cinématographiques sans succès ; sans public ; le domaine de la musique compte ainsi de nombreux acteurs, incapables de réunir un public de 15 personnes, on en a vus dans ce pays et c’est toujours cette catégorie sans public, sans auditoire, qui se plaint d’insuffisance ou de manque de droits. Avez-vous une seule fois entendu Magic system, Meiway, Alpha Blondy, Roselyne Layo, Ismael Isaac, Didi B, Kedjevara, Josey Priscile, etc. se plaindre de droits non payés ?
Quelles sont les voies de recours pour un artiste qui se trouverait dans l’une ou l’autre des situations ?
Qu’il adresse un courrier de réclamation ou une plainte aux services de Perception et de la Répartition. C’est ce qui se fait toujours et dans 99 pour cent des cas, les plaignants ont eu tort.
« Nous soutenons des projets sous le sceau d’une aide à la création »
Des artistes se plaignent également que le BURIDA ne soutienne pas financièrement les projets qui lui sont soumis. Notamment, l’organisation de spectacles. Qu’en dites-vous ?
C’est encore là une autre preuve de méconnaissance de la fonction du BURIDA. Comme toute organisation de gestion collective (OGC), le rôle du BURIDA est de percevoir les droits d’utilisation des œuvres artistiques et de les répartir à leurs auteurs. Ce sont ceux qui utilisent ces œuvres par écoute, visionnage ou reproduction qui doivent verser ces droits au BURIDA par acte civique, volontaire, ou par coercition policière ou juridique. La situation est donc la suivante : un obscure artiste musicien X a fait trois playback bèndèkouassikro durant toute une saison artistique. Parfois, son œuvre n’est pas même déclarée au BURIDA. Et un jour, il s’en va déclarer à la presse qu’il est gravement victime d’une intolérable injustice du BURIDA ! Organiser des spectacles ne fait pas partie des fonctions du BURIDA. Mais nous soutenons des projets sous le sceau d’une aide à la création.
Monsieur le président du Conseil de gestion, vous êtes aussi un écrivain. Quelle est la place des écrivains au sein du BURIDA ?
Elle est presqu’inexistante pour le moment, je l’avoue. C’est que d’inutiles lourdeurs administratives pèsent sur leur inscription au BURIDA. Sur mon éclairage, le conseil de gestion vient de lever ces obstacles. Bientôt, les écrivains pourront s’inscrire en masse au BURIDA.
Avez-vous un message particulier à l’endroit des artistes membres du BURIDA ?
Non. J‘ai suffisamment de problèmes à régler avec la population actuelle de sociétaires. Près de 10 000.
Interview réalisée
par Marcel Zokou
Légende photo : Avec le franc-parler qu’on lui sait, Tiburce Koffi, a parlé du BURIDA et des relations de la Maison avec les artistes. (Archives)
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