La Côte d’Ivoire figure au nombre des pays africains dont les œuvres sculpturales se retrouvent de façon illégale dans certains musés occidentaux ou chez des particuliers. Une statuaire Bété de la région de Gagnoa est détenue par une famille en France depuis plus d’un siècle. Le récit du voyage de la statuaire sur les bords de la Seine.
Le voile se lève de jour en jour sur les traces des actes ignorés de la colonisation en Afrique. Les objets issus de la sculpture africaine précoloniale sont de plus en plus découverts dans certains musées occidentaux u chez des particuliers. Les réclamations et les demandes de rétrocession à cor et à cri de ces objets d’arts vieux de plusieurs siècles, notamment les statues emportées dans les flammes de la colonisation portent aujourd’hui leurs fruits pour la plupart des pays victimes de cette spoliation. Quand d’autres pays ne savent pas à ce jour la destination véritable des leurs. Avec le temps, la vérité sur la disparition massive des objets d’art volés sur le continent africain durant la colonisation surgit progressivement.
La Côte d’Ivoire, pays de l’Afrique de l’Ouest, longtemps en marge jusque-là de ce phénomène crucial, regorge tout aussi de nombreux sculpteurs dans toutes ses régions. Leurs divers talents sont l’occasion de grande curiosité de la part de nombreux touristes qui, au détour d’une visite découverte sur les bords de la lagune Ebrié, n’hésitent pas à imprimer leur séjour par l’acquisition de quelques pièces précieuses.
La région de Gagnoa dans le Centre-Ouest de la Côte d’Ivoire, dans un contexte assez particulier, a été la destination recommandée du chercheur français Jean-Baptiste Filloux. Parti de l’Indonésie au terme d’une mission de relevés géodésiques et topographiques, il a séjourné de 1911 à 1913 en Côte d’Ivoire, précisément dans la région de Gagnoa. Et pour cause, conduire des recherches sur le peuple Bété, objet d’intérêt des Occidentaux.
C’est à l’occasion de cette mission d’enquête que le chercheur français serait certainement frappé par l’extraordinaire beauté d’une statuaire féminine Bété dont la taille est d’environ 52cm. Selon B. Holas dans son ouvrage paru en 1968 et intitulé «l’Image du monde Bhété », décrit la splendeur de la statuette féminine, tel un corps scarifié, présentant l’image d’une femme debout, les mains reposant de chaque côté d’un ombilic proéminent, s’incruste dans un petit corpus des œuvres provenant des sculpteurs Bété. Les incrustations de verre au niveau des yeux, déclinent une certaine unicité au sein du corpus, affirme-t-il ; les caractères faciaux, le front ressorti, le nez et la bouche sculptés avec dextérité, et la scarification frontale verticale, propulsent inéluctablement en direction des archétypes de l’art Bété, selon B. Holas qui s’est voulu fidèle dans la présentation de l’objet historique.
La description parfaite de la statuaire faite par B. Holas achève donc de convaincre le commun des mortels sur son appartenance à l’art Bété, et donc au patrimoine culturel ivoirien. L’œuvre sculpturale serait gardée depuis lors dans la famille du chercheur Jean-Baptiste Filloux.
A l’instar de plusieurs nations où de multiples objets d’arts ont été dérobés et ont été retrouvés pour finir dans des musés à l’étranger, notamment en Occident, et se sont vu rétrocédées lesdites œuvres au terme de moult dénonciations et réclamations tonitruantes, la statuaire Bété issue du patrimoine culturel national saurait être retrouvée un jour pour être remise au Musée des Civilisations de Côte d’Ivoire ? Toute l’interrogation se trouve là.
Marcel Zokou
Légende photo : Une statuaire ivoirienne qui elle n’a pas été volée.
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