Succession à la chefferie du village  – Toute la vérité sur la crise à N’Gatty

L’arrêté de nomination du chef, Akpa Sié André, du village communal de Dabou, N’Gatty, ne fait pas l’unanimité dans la localité. La délégation du village avec le  doyen d’âge, Esmel Simon, qui s’est rendue à préfecture de Dabou, le 2 mars 2023, a décidé de saisir les autorités et institutions compétentes, pour que le droit soit dit dans le processus de nomination du chef dans le village. Selon les partisans de Seké Benson, si rien n’est fait pour désigner le chef du village selon les us et coutumes, il y a d’énormes risques de conflit et de tensions dans la localité.

Selon un courrier daté du 19 novembre 2022, fait à N’Gatty, par un membre de la génération Sêtê (Adjrofi qui signifie que cette génération est dans l’anti-chambre s’organisant pour être au pouvoir dans 8 ans), Essoh Joseph, le chef du village est désigné au sein de la classe d’âge investie en qualité d’Eb-Ebou (les patriarches gouvernants actuels). A en croire les Adjrofi, ce principe est admis par les prédécesseurs et aînés, la génération Nigbessi.

« Ainsi M. Akpa Sié André désigné de façon consensuelle par les Eb-Ebou, pour assurer la fonction de chef a été présenté à la communauté villageoise lors de l’assemblée générale extraordinaire du village, qui dans un tonnerre d’applaudissements, a donné son accord total à ce choix », précise la génération Adjrofi. Durant l’assemblée générale qui a eu lieu, le 28 mai 2022, des jeunes, après le plébiscite d’Akpa Sié André par les patriarches gouvernants, ont envahi la place publique pour proférer des injures et exercer des violences sur lesdits patriarches et les villageois acquis à la légalité coutumière, au dire de Essoh Joseph.

La délégation du village de N’Gatty qui s’est rendue le 2 mars 2023 chez le Préfet de Dabou, Monsieur N’Zi Kanga Remi, a exprimé son mécontentement et son désaccord sur la méthode de déroulement de la consultation populaire en date du 1er février 2023 qui a eu lieu à N’Gatty. Ce, en présence de Mme le Sous-préfet de Dabou, Mme Tiekpelé Soro Minata, qui a présenté un seul candidat sur les deux candidats présents sur les lieux de la cérémonie (la place publique).

Les hôtes du préfet ont dénoncé le fait que Mme le sous-préfet n’ait pas donné la parole à toutes les composantes du village de N’Gatty lors de la consultation populaire du 1er février 2023. Ces composantes sont les chefs de générations, le doyen d’âge, le chef de terre, le président des jeunes et la responsable des femmes etc. Pire, les partisans de Séké Benson ont trouvé que le sous-préfet, Tiekpelé Soro Minata, a imposé Akpa Sié André, en tant que chef, à la communauté villageoise au détriment de Seké Benson qui a assuré l’intérim de chef de 2016 à fin 2022. Les partisans de Seké Benson estiment que l’assemblée générale du 28 mai 2022, de la génération Bôdjl, non seulement ne s’est pas tenue sur la place publique mais elle n’a pas réuni toutes les composantes sociales de N’Gatty.

Les pro-Seké Benson estiment que le préfet de Dabou devait mener une enquête avant de délivrer l’arrêté de nomination de Monsieur Akpa André. Surtout qu’il a reçu un courrier de contestation, deux jours après la consultation populaire. Aussi, faut-il préciser que Mme le Sous-préfet et  le préfet de Dabou ont reçu concomitamment deux procès-verbaux de l’assemblée générale du village : une AG, appartenant aux pro-Akpa Sié André (faite au domicile du Milowl de la génération Bôdjl) et l’autre, appartenant aux pro-Seké Benson (s’est tenue sur la place publique). Malheureusement, l’on a remarqué que c’est uniquement le procès-verbal des partisans de Akpa Sié André qui a fait l’objet de la consultation.

Le préfet a indiqué qu’il s’est basé sur le procès-verbal de l’assemblée générale des Bôdj de N’Gatty croyant que l’assemblée avait été légale. Le préfet a cependant révélé que le procès-verbal de l’assemblée générale du village et l’arrêté de nomination du chef peuvent être attaqués devant les tribunaux, dans la mesure où la Côte d’Ivoire est un pays de droit. Il a également mentionné que ce n’est pas l’administration qui choisit le chef dans un village et que dès son arrivée à Dabou, il a demandé au chef intérimaire, de s’organiser en vue d’être confirmé. Mais le chef intérimaire n’a pas pris d’initiatives dans ce sens.


Il faut savoir que le village de N’Gatty a connu le calme, la sérénité et l’ordre avant, pendant et après la consultation populaire, grâce aux consignes du préfet lors de la réunion préparatoire qu’il a organisée en présence des chefs des différentes générations, le chef de terre, le doyen d’âge, le président des jeunes et la responsable des femmes, avec la participation des forces de l’ordre.

Les critères pour être chef de N’Gatty sont: être fils du village, être majeur, être de bonne moralité, avoir une résidence dans le village, avoir servi comme notable ou secrétaire auprès d’un chef et être aimé par la majorité  de la population. Nous apprenons que le chef à N’Gatty meurt au pouvoir. Les Patriarches au pouvoir appelés encore « gouvernants traditionnels » estiment que c’est en leur sein que doit sortir le chef du village. Alors qu’il n’a jamais été dit ni écrit dans les textes de lois et règlements intérieurs du village. Le chef est désigné à vie et non par un mandant de huit (8) ans.

N’Gatty est un village Adjoukrou de 4000 habitants, situé à 4 kilomètres de la ville de Dabou. Les Adjoukrou de N’Gatty sont organisés en classes d’âge et chaque classe d’âge, appelée encore génération est dirigée par un chef de génération, appelé en langue, « Milowl ». Il existe 7 classes d’âge qui sont : M’Borman, Nigbessi, Bôdjl, Sêtê, N’Djruman, Abroman et M’Bédié.

Selon les us et coutumes en pays Adjoukrou, chaque classe d’âge qui vient au pouvoir traditionnel, a un mandat de 8 ans non renouvelable. Ce pouvoir, est différent de celui de la chefferie, qui a un mandat à vie. La preuve est que, depuis la création de ce village 5 chefs se sont succédés. Ce sont par ordre chronologique, chef Agboudjou Moïse, chef Ess Metch, chef Gongo Essoh Jacques, chef Djedjro Philippe et chef Lasme Sié Paul.

Tous ces 5 chefs ont géré en paix, le village et sont morts au pouvoir. En effet, au décès du dernier chef (Lasme Sié Paul), c’est l’un de ses notables, M. Seké Benson, qui a pris les commandes et, qui a assuré l’intérim de 2016 à fin 2022.

Nedson Djinsou

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