Agent de joueurs homologué par la FIFA, Alfred Obou n’est plus à présenter dans le monde sportif ivoirien et international. Il a encadré plusieurs footballeurs professionnels dont Kader Kéita. Alfred Obou s’ouvre ici au «Monde Actuel ».
Quelle est l’implication des parents dans les transferts des footballeurs, en général ?
Les règles organisant les transferts sont très clairs. En Côte d’Ivoire, nous avons une fédération compétente en la matière. Un joueur ne peut être transféré sans l’accord de son club. Le droit fédéral reste au club. Les parents n’ont rien à voir dans la transaction dans la mesure où le footballeur est majeur, il est libre.
C’est vous qui avez transféré l’international ivoirien Kader Kéita lorsqu’il était en activité ?
Oui, d’Al Saad à Lille et ensuite de Lille à Lyon.
Vous en avez transféré d’autres ?
Oui, beaucoup d’autres, mais je ne parlerai pas d’eux, par principe.
Savez-vous que certains individus transfèrent des footballeurs en votre nom ?
Oui, je l’ai récemment appris. Dans le football, il y a beaucoup d’argent. Là où il y a de l’argent se trouvent des malhonnêtes. Parfois, ce sont les parents, eux-mêmes, qui livrent leurs enfants aux escrocs. Ils ne s’informent pas pour savoir à qui s’adresser. Ils doivent aller à la FIF, elle leur montrera le chemin qui mène aux professionnels. Je souligne que je n’envoie personne pour duper des familles. Je demande aux voleurs de ne pas salir mon honneur.
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Que faut-il pour avoir le droit de transférer un footballeur ?
A l’époque, il fallait une licence à un agent pour le faire. Pour moi, une licence ne fait pas de quelqu’un, un bon agent. Pour transférer un joueur, un centre de formation a les mêmes droits qu’un club. La FIF a demandé récemment à ces derniers de suivre la règlementation. Aujourd’hui, sur la question des transferts, tout le monde est pressé.
Footballeurs, agents, clubs et parents des footballeurs. C’est un véritable cafouillage. Il y a 10 ou 15 ans, je pouvais transférer 3 ou 4 joueurs par an. Maintenant, je fais une année voire plus sans en transférer un seul. Il n’y a plus de bons joueurs à transférer en Côte d’Ivoire. Les stades se vident et les annonceurs ne viennent plus.
Selon vous, pourquoi les stades se sont-ils vidés ?
C’est la faute à CANAL +. Les championnats étrangers ont envahi la télévision. Les gens préfèrent rester chez eux pour suivre les matchs. Vous comprenez donc que le problème du football ivoirien, c’est CANAL +. Il faut que l’Etat s’implique pour régler ce problème. Pourquoi ne pas, par exemple, s’arranger avec CANAL + pour organiser, harmoniser les horaires de diffusion des matchs ? Laisser passer nos matchs avant les leurs ou vice-versa.
La baisse du niveau du championnat n’y est-il pas pour quelque chose ?
J’accuse les centres de formation. Ils veulent transformer les joueurs. Pour eux, un joueur doit être complet. Ce qui est impossible. Un enfant a des qualités propres. C’est l’assemblage des différentes qualités qui font une équipe complète. Les centres de formation tuent les qualités des enfants.
Quelle est votre actualité ?
C’est la même. Je cherche des joueurs à transférer. Je ne fais que ça.
Comment se passe votre collaboration avec les autres agents de joueurs ?
Il y en a que j’aime beaucoup. D’autres moins. D’autres auxquels je ne parle pas et d’autres encore avec lesquels je m’entends bien. C’est la vie.
Comment devient-on un bon agent de joueurs ?
Ce n’est pas l’agent qui fait le joueur, c’est le joueur qui fait l’agent. Quand tu as un grand joueur, tu es un grand agent. Lorsque c’est un petit joueur, tu es un petit agent. On parle de Mendes parce qu’il a Cristiano Ronaldo. Un joueur, il faut le draguer. Un bon agent doit être un bon dragueur. Moi, le football m’a tout donné. Il m’a ouvert plusieurs portes. Grâce à lui, je parle à des hommes importants. C’est une satisfaction.
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Où vivez-vous ?
Je suis actuellement beaucoup plus à Abidjan, sinon j’ai vécu en Suède durant 35 ans.
Une confidence liée au milieu sportif ?
La Côte d’Ivoire a besoin de journalistes capables de faire progresser le football. Vous devriez aller dans le pays profond pour donner la parole à des dirigeants ou aux joueurs oubliés. Le football ivoirien se trouve dans les centres de formation et les académies. Ils évitent la prison et la déchéance à de nombreux enfants.
Il est important de trouver ou créer les structures du pays et les infrastructures pour permettre aux clubs du nord comme Korhogo, Odienné, Ferkessédougou ou Katiola de jouer chez eux pour égayer leurs populations. Comment comprendre qu’une équipe de Korhogo joue ses matchs de championnat à Abidjan ? Et cela ne dérange personne. C’est grave ! Le football ivoirien est à refaire, à reconstruire.
Propos recueillis
par Arthur Zébé
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