Le président de Côte d’Ivoire, Alassane Ouattara, a eu un entretien, le mercredi 07 septembre 2022, au palais présidentiel d’Abidjan-Plateau , avec son homologue de Pologne, Andrzej Duda, qui effectuait une visite d’amitié et de travail de 48h en terre ivoirienne. Il s’agissait de la toute première visite d’un chef d’Etat polonais en Côte d’Ivoire. Ce qui a évidemment grandement réjoui le président Alassane Ouattara. Par ailleurs, le chef de l’Etat ivoirien a remercié le président Andrzej Duda et les autorités polonaises pour leur sens de l’hospitalité et la solidarité dont ils ont fait preuve lors de la survenue de la crise russo-ukrainienne, en permettant aux ressortissants de plusieurs nationalités fuyant la guerre, de transiter par la Pologne, au nombre desquels 250 étudiants ivoiriens et 80 jeunes africains, avant de regagner leurs destinations finales.
Alassane Ouattara a présenté les potentialités socio-économiques de la Côte d’Ivoire à son hôte en précisant que l’économie ivoirienne est en pleine expansion, en dépit de la survenue de la Covid-19, avec un taux de croissance de 2% en 2020, et des perspectives de croissance de 7 à 8% dans les cinq années à venir. Dans la même veine, il a ajouté que le taux d’inflation est très bas, et les investissements, notamment privés, élevés. M.Ouattara, a encouragé, à cet égard, les entreprises polonaises à venir investir en Côte d’Ivoire, tout en demandant aux entreprises ivoiriennes d’aller davantage en prospection en Pologne.
Dans ce cadre, les deux chefs d’Etat ont convenu de l’organisation d’un business-forum, dans les mois à venir, pour booster leurs relations économiques et commerciales, car les deux pays peuvent accroître leur coopération dans les domaines de l’agro-industrie, la santé, l’énergie, des mines, de l’économie et des finances, de la sécurité et de la défense. Parlant de la guerre en Ukraine, le président ivoirien a fait état des préoccupations des pays africains concernant les incidences de cette crise sur les échanges internationaux et le taux de croissance de l’économie mondiale qui risque d’entrer en récession. Il a exhorté la communauté internationale à davantage de solidarité à l’égard des pays africains.
Le président de Pologne, Andrzej Duda, a remercié le chef de l’Etat ivoirien pour la qualité de l’accueil et des échanges qu’ils ont eus. Il s’est réjoui d’être le premier chef d’Etat polonais à visiter l’Afrique de l’Ouest et la Côte d’Ivoire en particulier, dont il a salué le niveau de développement sous le leadership du Président Alassane Ouattara. Au plan diplomatique, le président de la Pologne a salué la position du président Alassane Ouattara et de la Côte d’Ivoire vis-à-vis de la crise ukrainienne.
Après avoir reconnu l’impact négatif de cette crise sur l’économie mondiale, en particulier dans les domaines de la sécurité alimentaire et de l’énergie, Andrzej Duda, a souligné que l’objectif de sa visite en Afrique de l’Ouest et en Côte d’Ivoire est de renforcer la coopération de son pays avec cette partie du monde. S’agissant singulièrement de la Côte d’Ivoire, il a fait remarquer que la coopération pourrait être renforcée dans les domaines de l’agriculture, des Nouvelles Technologies, de l’énergie et des mines, de la politique, de l’économie, mais également entre les peuples polonais et ivoirien. A cet égard, il a réitéré son accord pour l’organisation d’un business-forum économique entre les deux pays. Le chef de l’Etat polonais a invité, à son tour, le président Alassane Ouattara, à effectuer une visite officielle en Pologne. Notons qu’un Mémorandum d’entente a été signé entre la Côte d’Ivoire et la Pologne par lequel les deux pays décident d’instaurer entre eux des consultations régulières sur des sujets d’intérêt commun.
Le président de la Pologne a quitté Abidjan, le jeudi 08 septembre 2022, dans la matinée. Pour se rendre au Nigeria puis au Sénégal. Les vraies raisons de cette visite en Côte d’Ivoire et en Afrique de l’ouest, il faut le préciser, ne sont pas économiques ; elles sont essentiellement diplomatiques et politiques. Le président polonais était venu en Côte d’Ivoire et s’est rendu dans certains pays africains pour rechercher le soutien diplomatique des pays africains en faveur de l’Ukraine et de l’Occident contre la Russie dans le cadre de la guerre en Ukraine. Au-delà du soutien diplomatique et politique, la Pologne souhaitait bien, avons-nous appris, un soutien en termes d’hommes et d’armes (de fabrication russe) pour l’armée ukrainienne à long terme. L’Occident dont la Pologne est l’émissaire circonstanciel a mis assidûment une forte pression sur les pays africains afin qu’ils changent de position relativement à la guerre en Ukraine. Que les pays africains cessent d’être neutres pour condamner la Russie. En clair, l’Occident veut vaille que vaille impliquer l’Afrique dans le conflit en Ukraine afin qu’elle soit une partie au conflit.
La Pologne peut-elle apporter au plan économique de nombreux acquis à la Côte d’Ivoire ? Nous pouvons en douter volontiers parce que la Pologne, elle-même, n’est pas dans une situation économique reluisante. Pour dire vrai, la Pologne n’a pas assez de moyens financiers pour faire face aux besoins de sa propre population, ce n’est donc pas dans des investissements extérieures qu’elle pourrait donc s’engager. La Pologne souffre d’une inflation galopante. Il pourrait traverser une période économique plus trouble encore à l’horizon 2023. En avril 2022, l’inflation s’élevait à 12,3 %, et les experts s’accordent à dire que le pic est encore à venir. Pour expliquer le phénomène, la publication libérale a interrogé Stanislaw Gomulka, économiste au sein du Business Centre Club, une association d’entrepreneurs en Pologne. L’ancien vice-ministre des Finances de Pologne, Stanislaw Gomulka, a même avoué que les perspectives économiques sont plutôt sombres pour le pays. La Pologne qui est en période de forte récession économique est à la recherche de ressources financières pour faire face à la flambée des prix et aux problèmes énergétiques auxquels elle est confrontée. La Pologne tend même la main à l’Union Européenne (UE) pour que l’UE lui apporte l’aide nécessaire à sauver son agriculture qui souffre de la pandémie du covid-19.
Par ailleurs, au sein de de l’Union Européenne (UE), la Pologne fait figure de mauvais élève. Un divorce avec l’UE a failli subvenir en 2021 lorsque le jeudi 7 octobre 2021, la Pologne a provoqué un séisme à Bruxelles en remettant en cause, pour la première fois de l’histoire de l’Union européenne (UE), l’un des fondements de l’institution, à savoir la primauté du droit européen sur les droits nationaux. Le tribunal constitutionnel de Pologne avait ainsi décrété que certains articles des traités de l’UE étaient « incompatibles » avec la Constitution polonaise. Une nouvelle étape dans l’escalade des tensions entre le pays d’Europe de l’Est et Bruxelles qui fait craindre un futur « Polexit ».
La position de la Pologne n’a toujours pas changé et cela a installé un malaise entre l’UE et la Pologne que la guerre en Ukraine a pour l’instant éclipsé. D’autant que l’Union Européenne demande des changements à la Pologne que ce pays refuse toujours. Depuis 2016, les relations entre les institutions européennes et le gouvernement polonais n’ont cessé de se dégrader. Au centre du conflit : une réforme judiciaire hautement controversée qui prévoit notamment la mise en place d’un nouveau système disciplinaire pour les juges. Portée par la majorité nationale-conservatrice du PiS (Droit et Justice), elle est la cible de critiques de la part de Bruxelles, qui dénonce une atteinte à l’indépendance de la justice. La Commission européenne a ainsi averti qu’elle utiliserait « tous les outils » à sa disposition pour faire respecter la primauté du droit européen. Sur le plan politique, il est impossible d’exclure un État membre. En revanche, la Pologne pourrait perdre de son influence dans les différents organismes. Le pays est déjà sous le coup de sanctions via l’Article 7 du traité sur l’UE. Celui-ci vise à punir un État membre qui ne respecterait pas ses valeurs fondatrices.
Autre réalité polonaise qui dévoile le vrai visage de ce pays est le fait que la Pologne, qui est en difficulté financière, demande à l’Allemagne Dans un rapport rendu public, le jeudi 1er septembre 2022, la Pologne estime à 1 300 milliards euros, les dommages causés par l’Allemagne nazie aux Polonais et demande à Berlin d’engager des négociations sur une indemnisation. L’armée nazie sous Adolf Hitler a envahi la Pologne, en septembre 1939. Plus de 80 ans après, la Pologne réclame toujours réparation des pertes subies lors de la seconde guerre mondiale. Varsovie estime à 6,2 trillions de zlotys, soit 1 300 milliards d’euros, le coût financier occasionné par le conflit au pays. Un tel pays qui est en proie à des difficultés économiques ne peut pas porter le développement d’un autre pays, qu’il soit d’un continent pauvre comme l’Afrique. Par ailleurs, dans sa coopération avec l’Union Européenne (UE), la Côte d’Ivoire ne peut pas compter sur la Pologne qui ne constitue pas une voix indiquée et écoutée.
Les chefs d’État ou de gouvernement des États membres de l’Union africaine (UA) et de l’Union européenne (UE) se sont réunis à l’occasion du sixième sommet Union européenne ‑ Union africaine qui s’est tenu à Bruxelles les 17 et 18 février 2022. Ce sommet n’a pas obtenu de résultats satisfaisants pour la partie africaine, selon de nombreux observateurs. Les Européens estiment aussi que ce sommet ne fut pas un succès. Au regard, de cette situation, on peut valablement s’interroger sur ce que une coopération économique avec la Pologne apportera à la Côte d’Ivoire .
Une contribution de
Moussa Koné
Ressortissant africain résident en Europe
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