La crise au Front populaire ivoirien (FPI) se durcit de plus en plus à l’approche du 5ème congrès ordinaire de ce parti politique qui se tiendra, les 8 et 9 novembre 2024, à la Fondation Felix Houphouët-Boigny pour la paix de Yamoussoukro, capitale politique et administrative de Côte d’Ivoire.
Deux tendances vont s’affronter pour le poste de nouveau président du FPI lors de ce congrès ordinaire électif. Chaque tendance ayant son candidat. L’ancien Premier ministre, Pascal Affi N’Guessan, qui dirige le FPI depuis 23 ans, est en lice pour un nouveau mandat. Le député de Bongouanou sous-préfecture et ancien président du conseil régional du Moronou est le leader de la tendance au FPI qui veut la rupture du partenariat entre le FPI et le RHDP, le parti au pouvoir. Cette tendance est, par ailleurs, favorable au rapprochement du FPI avec le PPA-CI, le parti politique de l’ancien chef d’Etat, Laurent Gbagbo.
Pascal Affi N’Guessan a déposé sa candidature pour sa propre succession à la tête du FPI, le lundi 23 septembre 2024, auprès du comité de contrôle, au siège de la formation politique sis à Cocody-Les 2-Plateaux (Abidjan). Le dossier d’Affi N’Guessan a été remis par son directeur de cabinet et vice-président du FPI, Adoukou Bernard, à Tano Ablan Rosa, secrétaire générale adjointe du FPI chargée de l’administration mandatée par le comité de contrôle dudit parti.
Deux tendances s’affrontent
Le mardi 24 septembre 2024, l’Avocat et professeur de droit, Pierre Dagbo Godé, vice-président du FPI limogé et 3e adjoint au maire de la grande commune de Yopougon (Abidjan), a officiellement déposé sa candidature à la présidence du FPI, marquant ainsi sa détermination à affronter le président sortant, Affi N’ Guessan, lors du prochain congrès. Pierre Dagbo Godé apparait comme le candidat de la tendance adverse à celle incarnée par Pascal Affi N’Guessan. Une tendance qu’incarne également l’ancien secrétaire général et porte-parole du FPI, Issiaka Sangaré, récemment limogé par Affi N’ Guessan. Les tenants de cette tendance ne veulent ni la rupture du partenariat qui lie le FPI au RHDP depuis 2023, ni le rapprochement du FPI avec PPA-CI, encore moins l’acceptation de l’appel lancé par Laurent Gbagbo, en juillet 2024, à Bonoua.
La cérémonie de dépôt de candidature de Pierre Dagbo Godé s’est déroulée en présence d’Honoré Koua Wognin, président du Comité de contrôle du FPI, et de nombreux militants. Pierre Dagbo Godé a exprimé sa satisfaction quant au bon déroulement du processus, soulignant l’importance de cette étape pour l’avenir du FPI.
Face à la presse, il a sévèrement critiqué les 23 années de présidence de Pascal Affi N’Guessan. Il a dénoncé un « grand immobilisme » et une « mauvaise gouvernance » qui, selon lui, ont paralysé ledit parti. « Le personnel qui travaille ici (au siège du FPI) n’a pas son salaire régulièrement. Le journal Notre Voie est complètement sinistré. En 23 ans de gestion, le FPI n’a pas de siège propre », a-t-il souligné, ajoutant que le siège actuel du FPI est une fondation offerte par le Parti socialiste français.
Dagbo Godé critique sévèrement la gouvernance d’Affi N’Guessan
Pierre Dagbo Godé a ensuite appelé à un renouveau du FPI. « Le temps est venu aujourd’hui de tourner cette page et de faire un FPI nouveau, un FPI dynamique, un FPI capable de comprendre les défis qui se posent à la Côte d’Ivoire. Et ces défis nouveaux, c’est la paix, ça c’est en premier. Deuxièmement, c’est le développement économique et social », a-t-il affirmé. Fort du soutien de la majorité des fédérations du FPI, Pierre Dagbo Godé se dit confiant quant à ses chances de remporter la présidence du FPI lors du congrès ordinaire. « En tout cas, on ne s’engage pas dans un combat politique quand tu n’es pas sûr de le gagner et moi, je sais que serai élu le 9 novembre 2024 comme président du Front populaire ivoirien », a-t-il dit.
Avant de dénoncer les récents limogeages et nominations au sein du secrétariat général du FPI entrepris par le président sortant, Pascal Affi N’Guessan. « Je n’ai pas voulu me prononcer sur cette question parce que ça concerne plusieurs personnes mais puisque vous posez la question, c’est la peur qui a gagné le camp de mon adversaire », a-t-il déclaré. Selon lui, ces changements sont une tentative désespérée de Pascal Affi N’Guessan pour consolider son pouvoir face à une candidature perçue comme menaçante.
« Il s’agit d’une dérive stalinienne »
Il a qualifié ces décisions de « dérive stalinienne », accusant le président sortant de manipuler les structures du FPI pour éliminer ses adversaires. « En démocratie, dès lors que la date des candidatures est arrêtée, le président sortant qui gère les affaires courantes, ne peut plus prendre de décisions. Là, il dépose sa candidature à 14h, il limoge le secrétaire général du parti et président de l’organisation du congrès pour nommer ses partisans », a-t-il expliqué.
Le candidat à la présidence du FPI a appelé à un renouveau démocratique au sein dudit parti, critiquant la convocation du congrès qu’il juge irrégulière. « Ce congrès, on verra bien mais il a été mal convoqué. Ce ne sont pas les structures idoines qui devaient le convoquer », a-t-il affirmé. Il a également mentionné les démissions récentes de plusieurs responsables clés du FPI, qu’il attribue à une tentative de fraude électorale par peur de perdre les élections. Pour clarifier sa position et détailler ses accusations, Pierre Dagbo Godé a annoncé une conférence de presse prévue pour ce jeudi au siège du FPI. « Nous veillons au grain et le jeudi, nous avons une grande conférence de presse que nous comptons organiser, ici, au siège du FPI, et vous aurez notre position », a-t-il conclu. La campagne électorale s’annonce donc palpitante au FPI à deux mois de son congrès électif.
Didier Depry
Légende photo : Le vice-président du FPI limogé, Pierre Dagbo Godé, 3e adjoint au maire de la grande commune de Yopougon (en costume), a déposé sa candidature à l’élection du président du FPI, le mardi 24 septembre 2024.
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