Interview  Avantages de l’outil de signalement des actes de corruption de la HAGB  Paul Auguste Patinelli, directeur du système d’information : « Signalis vient pour combler quelque peu les faiblesses du système existant »

Interview

Avantages de l’outil de signalement des actes de corruption de la HAGB

Paul Auguste Patinelli, directeur du système d’information : « Signalis vient pour combler quelque peu les faiblesses du système existant »

 Concepteur de la plateforme Signalis avec ses équipes, Paul Auguste Patinelli, directeur du système d’information à la Haute Autorité pour la Bonne Gouvernance (HABG), nous présente ici de son produit dans le détail. Il en décline les nombreux avantages et reconnaît être satisfait des bienfaits de ladite plateforme.

 

-Qu’est-ce qui a motivé l’avènement de la plateforme Signalis ?

Paul Auguste Patinelli : Depuis 2015, la Haute Autorité pour la Bonne Gouvernance a en son sein un dispositif pour les plaintes et dénonciations qu’elle reçoit. Signalis vient pour renforcer ce dispositif qui existait déjà.

Ce dispositif comprend un service courrier qui reçoit des courriers de plaintes et de dénonciations. Ce dispositif-là est composé d’un call center, une ligne verte, le 800.800.11, que les usagers peuvent joindre par appels gratuits. Derrière, il y a une opératrice qui recueille les plaintes et dénonciations, les écrit et en fait un rapport. Ensuite, ledit rapport suit son cours.

Le 3ème élément de ce dispositif est notre site web. Et, sur ce site-là, il est aussi possible de télécharger des formulaires de plaintes et de dénonciations, de les renseigner et de les joindre à un email qui est aussi reçu par le call center. L’adresse mail est alerte@habg.ci.

Après, nous avons modernisé le site web de telle sorte que les usagers peuvent aujourd’hui directement renseigner en ligne le formulaire et, lorsqu’ils cliquent, ledit formulaire part sous forme de email au niveau du service en charge du recueil des plaintes et dénonciations.

Ce dispositif existant depuis 2015, l’idée-ci était alors de le renforcer. Signalis vient ainsi pour combler quelque peu les faiblesses du système existant. Par exemple, les appels des usagers reçus au call center n’étaient pas enregistrés. Nous ne nous fiions qu’aux rapports de la personne qui les rédigeait. Dorénavant, nous pouvons les enregistrer, les réviser…

Concernant, par exemple, les plaintes, lorsque nous faisions les statistiques, nous nous rendions compte qu’il existait beaucoup de plaintes anonymes. La crainte des représailles faisait que les gens faisaient parvenir leurs plaintes sans toutefois laisser leurs contacts. Il était donc difficile d’exploiter ces plaintes-là. Signalis vient aussi combler ce déficit-là en permettant, par exemple, à un requérant de garder l’anonymat, de donc communiquer de façon anonyme à travers un système par lequel il est impossible de remonter jusqu’à lui. Parce que c’est un système sécurisé.

Au total, il faut retenir que Signalis vient donc renforcer en profondeur le dispositif qui existait.

 

-Pourquoi avoir choisi le canal du numérique pour renforcer votre dispositif ?

Aussi simple que cela puisse paraître, aujourd’hui, l’usage de l’internet est très développé en Afrique. Cet usage est, de nos jours, plus développé qu’il y a 10 années.

Nous nous rendons compte que la plupart des usagers ont un téléphone Android. Le mobile money est très développé aujourd’hui. Ce qui fait que les Ivoiriens sont très à l’aise avec l’outil numérique. Par ailleurs, il y a cette frange de la population assez jeune et à l’aise avec l’outil numérique.

En utilisant le système internet, non seulement nous dématérialisons les courriers physiques, mais l’internet permet aussi de sécuriser les plaintes et dénonciations des usagers, puisque nous pouvons crypter tout ce qui est flux internet dans des réseaux privés virtuels.

Donc en choisissant l’internet, non seulement nous modernisons notre dispositif, mais aussi les plaintes et dénonciations parviennent plus rapidement. Pour recevoir un courrier, il faut au préalable qu’il passe par la poste, atterrisse au service courrier. Il faut en faire la décharge d’une direction à l’autre. Alors que là, il vient directement dans le système et atterrit à la direction en charge de recueillir cette plateforme. Donc, le but ici, c’est d’aller très vite, puis moderniser les usages aussi, tout en s’adaptant à l’ère du temps notamment.

Enfin, sur l’internet, on peut tout sécuriser avec les outils techniques.

 

-Quel en est le mode opératoire ?

Concernant Signalis, il faut savoir qu’il existe deux grands modes opératoires. Signalis se décline en deux grandes parties. L’usager peut, comme nous l’avons déjà fait savoir, utiliser l’internet pour accéder à Signalis. Il y a donc une plateforme www.signalis.habg.ci. Dès que vous êtes sur ladite plateforme, vous n’avez qu’à suivre les instructions. Lorsque vous finissez, vous déposez votre plainte qui va dans une base de données.

La deuxième manière d’y aller aussi, c’est d’appeler le 800.800.11. Ainsi n’est-il pas besoin d’avoir forcément recours au numérique.

Derrière ce numéro, nous avons créé ce que l’on appelle un serveur vocal qui vous pose des questions comme si vous étiez sur le site web et vous répondez ici oralement. Et lorsque vous validez votre opération, vos informations sont stockées dans une base de données.

L’un des objectifs ici en allant vers Signalis, c’est de centraliser dans une même base de données toutes les informations qui étaient éparpillées. Donc, ici, que ce soit vocal, que ce soit par l’internet. Bien sûr, vous convenez avec moi que nous réceptionnons toujours les courriers physiques.

Nous pouvons aussi scanner les courriers physiques et les diriger vers la même base Signalis. Pour ce faire, nous avons une base de données unique qui récupère toutes les plaintes et dénonciations quelle que soit la source et même le type de manière de soumettre cette plateforme-là.

C’est alors ce que je peux dire en ce qui concerne le mode opératoire. On peut y accéder par l’internet; on peut y accéder par téléphone. On peut, en outre, décider d’aller sur le serveur vocal. On peut, par ailleurs, parler à une opératrice comme on peut continuer aussi d’envoyer des courriers physiques à la Haute Autorité pour la Bonne Gouvernance. Signalis est en fait une plateforme multicanale qui donne la latitude à tout usager d’utiliser le canal qui lui sied.

 

-Existe-t-il une différence dans leur mode de fonctionnement et leurs missions entre Signalis et la plateforme SPACIA arrimée au ministère de la Promotion de la Bonne Gouvernance et de la Lutte contre la corruption ?

Du point de vue technique, je n’ai pas étudié la différence qu’il y a entre les deux plateformes. Donc je ne peux me prononcer là-dessus. Mais ce que je peux par contre avancer en me référant à la norme ISO 37002, qui est la norme internationale pour la mise en place des plateformes de signalement, c’est que cette plateforme indique qu’en principe , toute entreprise ou tout organisme devrait avoir en son sein une plateforme de signalement. Parce que les ministères sont spécialisés. Donc Signalis, au niveau de la Haute Autorité pour la Bonne Gouvernance, recueille des plaintes concernant la corruption et les infractions assimilées. C’est notre spécialité, notre spécificité, notre ADN.

Au niveau du ministère cité, il peut recevoir tout type de plaintes. Mais nous, nous regroupons les plaintes concernant uniquement la corruption et les infractions assimilées.

Les deux plateformes sont complémentaires. Elles ne se contredisent pas. Ça veut dire quoi au juste ? Ça veut dire que le ministère de la Promotion de la Bonne Gouvernance et de la Lutte contre la Corruption peut recevoir parmi sa panoplie de plaintes des plaintes qui concernent la corruption. Et il peut nous les transmettre pour que nous, nous puissions les suivre. D’autant plus que la HABG peut mener ce que nous appelons des enquêtes pénales. Le ministère travaille sur tout ce qui est administratif. Donc nous nous complétons. Et je ne trahis aucun secret en disant que normalement, il est prévu des collaborations entre les deux plateformes. Surtout qu’avec la nôtre, nous avons la possibilité de pouvoir prendre les informations sur d’autres plateformes et les y intégrer. Bien sûr en respectant la sécurité qui va avec. Et, dans ce cadre-là aussi, au-delà du ministère, je peux citer l’OSEP qui est l’Observatoire des Services publics avec lequel nous avons entamé un travail de collaboration. Cet Observatoire reçoit aussi tout type de plaintes. Mais nous collaborons avec lui afin qu’il nous reverse tout ce qui est plaintes pour corruption.

Vous voyez, voici un peu la différence. Nous, notre champ d’activité, c’est la corruption et les infractions assimilées. Et notre plateforme a pour ambition de centraliser tout ce qui est plaintes pour corruption et infractions assimilées.

 

-Comment les usagers ont-ils accueilli Signalis ?

J’estime, à mon niveau, que les usagers l’ont bien accueillie. Depuis le lancement de Signalis, vous avez pu constater dans la ville d’Abidjan l’existence d’une énorme campagne d’affichage. Sans oublier le battage médiatique dans la presse.

Pour moi, il y a eu un bon accueil de Signalis au sein des populations. Mais ce que je voudrais ajouter, c’est que nous venons tout juste de lancer notre plateforme. Nous l’avons fait précisément le 25 mai. Cela fait donc à peine 3 mois. Nous sommes donc dans une période d’observation pour l’amélioration continue de Signalis. Nous allons certainement faire un bilan à mi-parcours autour de 5, 6 mois. Et là, nous pourrions vous faire le point d’un bilan plus complet. Toutefois, nous pensons que notre plateforme a été très bien accueillie. Nous voyons qu’elle reçoit quasiment tous les jours les plaintes des usagers. En outre, nous-mêmes voyons une nette amélioration de façon globale.

 

-Toute la Côte d’Ivoire n’est pas couverte par l’internet. Est-ce que cela n’est pas un frein pour votre plateforme dans son ambition de toucher le plus grand nombre ?

Personnellement, je ne peux pas vous dire quel est le taux de couverture de l’internet sur le territoire national. Je ne suis alors pas bien placé pour dire que la Côte d’Ivoire n’est pas totalement couverte ou pas. Mais, par contre, je sais que, dans des villages très reculés, on a le téléphone. Donc, aujourd’hui, là où on a le téléphone, on a l’internet. Peut-être qu’il peut ne pas être en 3G, mais en 2G, ça passe.

Par ailleurs, l’on n’a pas forcément besoin d’être connecté à l’internet pour utiliser notre plateforme multicanale. Avec le téléphone, les courriers, l’on peut toujours joindre Signalis.

Toutefois, ce que je peux dire, c’est que dans la partie couverte par l’internet, l’on peut accéder à Signalis.

N’oublions pas que j’ai rappelé que Signalis est une plateforme multicanale. Nous continuons toujours de recevoir des appels et des courriers. Et, à partir des zones qui sont couvertes par le téléphone, nous recevons les appels téléphoniques. Pour celles qui sont couvertes par l’internet, nous recevons des plaintes via la plateforme web. Donc, dans les faits, nous ne sommes pas limités. C’est l’infrastructure qui est limitée. Mais là où l’infrastructure arrive, nous y allons.

Mais ce que je peux dire, c’est que tout est fait pour que la fibre optique soit déployée non seulement à Abidjan, mais aussi dans la plupart des grandes villes. Donc je pense que c’est un usage qui va aller en s’amplifiant. Le numérique, ce n’est pas un effet de mode. C’est une course de fond. Moi, je reste positif pour dire que les choses vont s’améliorer dans les contrées les plus reculées. Donc nous allons toujours continuer à dématérialiser notre process.

Entretien réalisé par Marcellin Boguy

 

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