La lauréate de la 16ème édition du Prix Ivoire pour la littérature africaine d’expression francophone, la romancière tunisienne Azza Filali, a reçu son trophée des mains de la représentante de la marraine, la ministre de la Culture et de la Francophonie Françoise Remarck, la directrice du Livre au ministère de tutelle, Gisèle Châtelain, et bien d’autres lots (deux chèques d’un million de Fcfa chacun, l’un venant de l’ambassade de France à Abidjan et l’autre de la Librairie de France Groupe). C’était au cours de la cérémonie de récompense du Prix Ivoire 2024, samedi 23 novembre, à l’hôtel Les Vallons sis à Abidjan-Cocody les II-Plateaux.
Dans son propos, après avoir reçu sa récompense, l’auteure de « Malentendues », avec lequel elle remporte le prestigieux prix, fera savoir : « En venant à Abidjan, je pensais recevoir un prix littéraire, mais j’ai découvert des êtres qui m’ont fascinée avec des caractères bien trempés et des histoires fascinantes ». Et de se réjouir que « mon passage à Abidjan a attiré les regards sur mon pays, la Tunisie. Je plaide pour nos pays africains, liés par la qualité d’une coopération à divers niveaux, arrivent à leur plein épanouissement dans l’implémentation de leur développement. Je suis pour que la coopération tunisio-ivoirienne s’intensifie, s’affermisse pour le bonheur de nos deux peuples ».
L’ambassadeur de son pays, la Tunisie, à Abidjan, SEM Zied Saadaoui, va prendre la balle au bond. En reconnaissant qu’il est « un ambassadeur très heureux, comblé, parce que, depuis votre arrivée en terre ivoirienne, je vis une dynamique de coopération, d’échanges, de rencontres avec nos amis ivoiriens. Je n’ai pas vécu jusqu’à votre arrivée. Ça, je le dis franchement ».
« Le Prix Ivoire est un miroir de notre société, une fenêtre ouverte sur les réalités, nos espoirs, les luttes, les rêves de notre continent »
Face à une telle donne, il dira : « Vous êtes donc une source d’inspiration pour moi, pour nous tous. Vous faites bien de parler de coopération à redynamiser. Il faut que nous travaillions davantage dans ce sens. Il y a plein de talents à découvrir aussi bien en Tunisie qu’en Côte d’Ivoire. Il faut juste trouver les occasions, multiplier les rencontres, les discussions… ».
Quant à la représentante de la ministre Françoise Remarck, Gisèle Châtelain, elle dira que le Prix Ivoire est bien plus qu’une distinction. « Il est un miroir de notre société, une fenêtre ouverte sur les réalités, nos espoirs, les luttes, les rêves de notre continent. Il illustre la capacité des écrivains africains à faire entendre leur voix et à donner au monde une autre image de l’Afrique. Celle d’un continent riche, complexe et en constante évolution. En honorant la lauréate Azza Filali pour son roman « Malentendues» aux Editions Elyzad 2024 de 326 pages, nous rendons hommage à une plume dont l’oeuvre transcende les frontières et les époques. Nous célébrons le pouvoir des mots, ces mots qui nous rassemblent ». Mme Châtelain a aussi tenu à encourager le combat que mène la lauréate pour la Tunisie, pour l’Afrique. « Par la littérature, nous y arrivons toujours ».
Wêrê Wêrê Liking, la présidente du jury, revenant sur le mode opératoire qui a abouti au choix de la lauréate du Prix Ivoire 2024 et avant de passer à la proclamation du palmarès 2024 du prix instauré par l’association Akwaba Culture, avancera qu’« il y a aucun doute, cette dame a gagné son prix. Le jury devait se prononcer sur 5 ouvrages. (…) Une mention spéciale est attribuée à Charline Effah (Gabon) pour son roman « Les femmes de Bidibidi ». Mais Azza Filali est belle et bien la lauréate du Prix Ivoire pour la littérature africaine d’expression francophone édition 2024 pour son roman « Malentendues ». Son ouvrage « Malentendues » est là pour nous dire que nous devons tous ensemble tolérer les idées nouvelles sur la femme. Et la grande leçon à tirer de ce roman est : « Soyons des hommes et des femmes à la mesure de notre existence ». La voix de cette auteure nous invite à repenser notre vie en société ».
L’écrivaine Kidi Bebey, fille de l’écrivain-chanteur camerounais Francis Bebey, qui a reçu un trophée en sa qualité d’invitée d’honneur du Prix Ivoire 2024, a révélé être très admirative du Prix Ivoire depuis son démarrage. Pour elle, « le livre est essentiel dans la construction d’un individu. Il nous permet de rester en vie, de savoir tout sur le monde ».
« La littérature que nous célébrons aujourd’hui est debout, elle nous parle »
Avant, dans son mot de bienvenue, la présidente de l’association Akwaba Culture, Isabelle Kassi-Fofana, est revenue sur l’historique de son événement créé en 2008 « dans un contexte de vive tension politique dans notre pays ».
A l’en croire, le Prix Ivoire désormais ne peut plus être condamné à l’oubli. Et il inscrit la place d’Abidjan sur la liste des hauts lieux de la vie littéraire africaine. « Il est chargé d’une pérennité qui ne souffre aucune discontinuité. Et ce, grâce au ministère de la Culture et de la Francophonie, aux mécènes, aux sponsors, au pré-jury, au jury, aux écrivains, éditeurs, journalistes, aux petites mains non moins utiles, enfin à tous ceux qui nous permettent de tenir la dragée haute. La littérature que nous célébrons aujourd’hui est debout, elle nous parle. Elle répond à nos pulsions les plus fortes. Elle questionne le monde dans lequel se promènent nos yeux tantôt ravis, mais très souvent apeurés. La 16ème édition du Prix Ivoire nous offre l’occasion de saluer une fois encore la dynamique des écrivains africains et des diasporas africaines, ainsi que celle des maisons d’édition qui portent sans faillir cette sublime initiative d’ordre culturel. La grande diversité des ouvrages en compétition, la richesse des thèmes mis en lumière… établissent les chemins d’espoir du livre africain », a-t-elle affirmé.
Le Prix Ivoire pour la littérature africaine d’expression francophone, institué en 2008, est porté par l’association Akwaba Culture. Il est placé sous le parrainage du ministère de la Culture et de la Francophonie, de l’ambassade de France à Abidjan et de la Libraire de France Groupe. Cette année, ledit prix a été placé sous le signe de l’esprit de responsabilité. En tenant compte du contexte économique mondial actuel marqué par la rareté des appuis financiers aux associations de promotion du livre et de la lecture. Les urgences étant ailleurs. Lesquelles n’intègrent point les programmes culturels pourtant essentiels au bien-être des populations. La conséquence des plus fâcheuses de cet état de fait est que bien des prix littéraires en Afrique et dans le monde sont en train de disparaître. Et, avec eux, s’éteignent les lumières braquées sur les écrivains, les éditeurs, les libraires et tout l’écosystème à l’arrière-plan. Ainsi la société toute entière met-elle en péril les œuvres littéraires qui nourrissent les imaginaires.
Marcellin Boguy
Légende photo : La romancière tunisienne Azza Filali, lauréate du Prix Ivoire pour la littérature africaine d’expression francophone, recevant son trophée.
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