Moins de deux semaines après le début de leur offensive fulgurante en Syrie, les rebelles emmenés par le groupe islamiste radical Hayat Tahrir al-Sham sont entrés la nuit dernière dans Damas et affirment, tout comme l’Observatoire syrien des droits de l’homme, que le président Bachar el-Assad a fui la Syrie. Le Premier ministre, lui, se dit prêt pour toute « passation » de pouvoir et à coopérer avec le « leadership » que choisira le peuple.
■ Le 27 novembre, une coalition de rebelles, menée par le groupe islamiste radical Hayat Tahrir al-Sham (HTS), a lancé une offensive à partir de son fief à Idleb, dans le nord-ouest de la Syrie, s’emparant de dizaines de localités et des villes stratégiques d’Alep, au nord, et de Hama, dans le centre. Le 7 décembre au soir, ils ont pris le contrôle de Homs, la troisième ville du pays, puis sont entrés dans Damas.
■ Dans la nuit de samedi à dimanche, l’Observatoire syrien des droits de l’homme, une ONG basée à Londres, et plusieurs groupes rebelles ont annoncé la fuite de Bachar el-Assad à l’étranger. Resté en Syrie, le Premier ministre Mohamed al-Jalali, lui, se dit prêt pour toute procédure de « passation » de pouvoir et à « coopérer » avec tout nouveau « leadership » choisi par le peuple.
■ Quelques heures avant ces événements, des dirigeants turcs ont rencontré leurs homologues iraniens et russes à Doha au Qatar, dans la journée de samedi. Les trois pays sont parties prenantes dans le processus d’Astana, mis en place en 2017 dans le but de mettre fin à la guerre civile en Syrie. A l’issue de la réunion, Ankara a dit souhaiter le retour de la paix en Syrie. De son côté, l’ONU a appelé à éviter un « bain de sang » dans le pays.
Des Syriens se filment dans la maison d’Assad pillée à Damas
Selon un journaliste de l’AFP, des dizaines de Syriens sont entrés dans la résidence du président Bachar el-Assad après qu’elle a été pillée, dans un quartier huppé de la capitale Damas, prise par les rebelles. Des hommes, femmes et enfants parcouraient le bâtiment de six étages, où des documents étaient éparpillés sur les escaliers. Une peinture représentant Assad gisait au sol à l’entrée du rez-de-chaussée, entourée d’un vaste jardin, selon le journaliste.
L’armée libanaise dit renforcer sa présence à la frontière avec la Syrie après la chute d’Assad
L’armée libanaise a annoncé renforcer sa présence à la frontière avec la Syrie dimanche, après la chute du président Bachar al-Assad et la prise de la capitale Damas par les rebelles. « Dans le contexte des développements rapides et des circonstances délicates que traverse la région (…), les unités chargées de surveiller les frontières nord et est ont été renforcées et des mesures de contrôle plus strictes ont été mises en place », a indiqué l’armée dans un communiqué. Des vidéos témoignent de la tension à la frontière libanaise, comme celle de cette journaliste d’Al Jazeera.
La Turquie dit être en contact avec les rebelles syriens pour garantir la sécurité
Le chef de la diplomatie turque a déclaré dimanche que son pays était en contact avec les rebelles en Syrie pour s’assurer que le groupe État islamique et le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) ne profitent pas de la chute du régime de Damas pour étendre leur influence. « Nous devons être vigilants pendant cette période de transition. Nous communiquons avec les groupes pour nous assurer que les organisations terroristes, en particulier Daech et le PKK ne profitent pas de la situation », a déclaré Hakan Fidan, lors du Forum de Doha au Qatar. Le ministre a précisé devant le Doha Forum au Qatar, que la Turquie avait travaillé avec les Syriens et les acteurs régionaux et internationaux pour « assurer aux pays de la région que la nouvelle administration et la nouvelle Syrie ne constitueront pas une menace pour les voisins et qu’au contraire, la nouvelle Syrie s’attaquera aux problèmes existants et éliminera les menaces ».
La France « salue la chute du régime de Bachar al-Assad »
La France « salue la chute du régime de Bachar al-Assad » après « plus de 13 ans d’une répression d’une grande violence contre son propre peuple », a réagi dimanche le porte-parole du ministère des Affaires étrangères Christophe Lemoine. Paris « appelle au silence des armes, à la préservation des institutions de l’État, au respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de la Syrie, (…) à une transition politique pacifique et respectueuse de la diversité du peuple syrien, qui protège les civils et toutes les minorités, conformément au droit international, (…) tous les Syriens à l’unité, à la réconciliation, et à rejeter toute forme d’extrémisme », poursuit-il dans un communiqué.
Après la chute d’Assad, l’Allemagne exprime un « grand soulagemet » et met en garde contre l’arrivée d’autres radicaux
L’Allemagne affirme que la chute du président syrien Bachar al-Assad représente « un premier grand soulagement pour des millions Syriens » tout en mettant en garde contre l’arrivée d’autres radicaux au pouvoir à Damas. « Le pays ne doit pas maintenant tomber entre les mains d’autres radicaux, quelle que soit la forme qu’ils prennent. Nous appelons donc les parties à assumer leurs responsabilités envers tous les Syriens », a ajouté dans un communiqué Annalena Baerbock, au lendemain de la fin d’un demi-siècle de règne du clan Assad après une offensive fulgurante des rebelles.
« Cela implique une protection complète des minorités ethniques et religieuses telles que les Kurdes, les Alaouites ou les chrétiens, ainsi qu’un processus politique inclusif qui crée un équilibre entre les groupes », a-t-elle ajouté. « La communauté internationale est également sollicitée pour que la Syrie sorte enfin du cycle de la guerre et de la violence », a-t-elle poursuivi.
Elle a affirmé que l’Allemagne « travaillait en étroite collaboration avec les Nations unies, ainsi que ses partenaires de l’UE et du Quad [qui regroupe outre l’Allemagne les États-Unis, la France, et le Royaume-Uni, ndlr], ainsi que les acteurs régionaux et voisins de la Syrie, comme la Turquie et la Jordanie ». Par ailleurs, elle a appelé à ce que Assad soit « enfin tenu pour responsable » après avoir « tué, torturé, utilisé des gaz toxiques contre sa propre population ».
En douze jours d’une contre-offensive éclair, les rebelles ont mis à 53 ans de règne de la dynastie Assad
Installé au pouvoir, presque par accident, en 2000, Bachar el-Assad n’a pas eu d’autre choix que de quitter la Syrie au terme d’une offensive éclair de plusieurs factions rebelles. Retour sur 24 années d’un régime sans pitié pour ses opposants, et soutenu à bout de bras par les parrains russe et iranien.
Assad est « probablement hors de Syrie » selon le ministre des Affaires étrangères turc
Bachar el-Assad est « probablement hors de Syrie », a déclaré Hakan Fidan ce dimanche lors du Forum de Doha, une conférence internationale au Qatar. Il répondait à une question lui demandant où se trouvait le dirigeant syrien et si sa vie était en danger.
Les forces rebelles sont entrées dans Damas sans avoir à combattre
Les images qui parviennent de la capitale syrienne montrent des scènes de liesse dans les rues, des détenus politiques libérés des prisons, des retrouvailles émouvantes entre des combattants et leurs familles. Les forces rebelles sont déployées dans les rues de Damas, où il n’y a plus aucune présence visible de l’armée syrienne et des services de sécurité, rapporte RFI.
Ce bouleversement spectaculaire intervient quelques heures après que le ministre de l’Intérieur ait évoqué un « solide » cordon de sécurité « infranchissable » autour de la capitale. Mais en réalité, l’armée ne voulait plus se battre et certaines figures du pouvoir, dont le Premier ministre Mohamed al-Jalali, ont réalisé que la bataille était perdue. Un minimum de coordination a permis d’éviter tout affrontement entre les forces rebelles et l’armée syrienne, qui s’est retirée dans ses casernes et ses bases.
La télévision d’État iranienne diffuse des images de saccage de l’ambassade à Damas
L’ambassade d’Iran en Syrie a été saccagée, a affirmé dimanche la télévision d’État iranienne, diffusant à l’appui des images tournées à Damas par la chaîne saoudienne Al-Arabiya. « Des inconnus ont attaqué l’ambassade iranienne, comme vous pouvez le voir sur ces images diffusées par diverses chaînes » étrangères, a déclaré la télévision d’État iranienne, après l’entrée à Damas d’une coalition rebelle qui a annoncé la chute du président Bachar al-Assad, dont l’Iran a été un allié indéfectible.
Avec la chute de Bachar el-Assad, l’Iran perd son principal allié dans la région
Après l’écrasement du Hamas et et la décapitation du Hezbollah, l’Iran perd son principal allié dans la région. Téhéran s’était engagé financièrement et militairement pour soutenir le régime du président Assad face aux rebelles depuis 2011 avec des milliards de dollars investis et 6 000 iraniens tués depuis près de quinze ans, rapporte RFI.
Avec le départ d’Assad, l’Iran perd pratiquement tous ses bras dans la région et se retrouve très affaibli sur le plan régional et international. Selon plusieurs députés, quelque 10 000 Iraniens se trouvent toujours en Syrie dont on ne connaît pas le sort.
La perte de la Syrie est aussi un coup dur puisque Téhéran envoyait de l’aide, notamment des équipements militaires, au Hezbollah et aux groupes islamiques palestiniens pour combattre Israël.
Scènes de liesse à Damas sur la place des Omeyyades . Selon Trump, Bachar al-Assad « a fui » la Syrie après la perte du soutien de la Russie
« Assad n’est plus là. Il a fui son pays. Son protecteur, la Russie, la Russie, la Russie, dirigée par Vladimir Poutine, ne souhaitait plus le protéger », a écrit Donald Trump sur sa plateforme Truth Social qui prendra ses fonctions le 20 janvier. Selon lui, la Russie « a perdu tout intérêt pour la Syrie à cause de l’Ukraine, où près de 600 000 soldats russes sont blessés ou morts, dans une guerre qui n’aurait jamais dû commencer et qui pourrait durer éternellement ». « La Russie et l’Iran sont actuellement affaiblis, l’une à cause de l’Ukraine et d’une mauvaise économie, l’autre à cause d’Israël et de ses succès au combat », a-t-il ajouté.
À la télévision publique syrienne, les rebelles semblent afficher une volonté d’une transition organisée du pouvoir
Les nouveaux maîtres de Damas et des personnalités de l’ancien régime semblent vouloir éviter un scénario à l’irakienne, qui s’est soldé par un indescriptible chaos. Il y a un souci évident de sauver l’État et ses institutions et éviter un vide qui serait occupé par des éléments ou des forces incontrôlées, rapporte notre correspondant à Beyrouth, Paul Khalifeh.
Le commandant de Hayaat Tahrir al-Sham, Ahmad al-Chareh, a appelé dimanche ses combattants à ne pas s’approcher des institutions publiques à Damas, qui restent, selon lui, sous le contrôle de l’ex-Premier ministre jusqu’à une « passation officielle ». Le chef du gouvernement Mohammad al-Jalali, s’est dit de son côté prêt à coopérer avec tout nouveau « leadership » choisi par le peuple.
Dans une vidéo publiée sur Facebook, Mohammad al-Jalali a dit que la Syrie « peut être un pays normal, construisant de bonnes relations avec ses voisins et avec le monde ». « Mais cette question sera du ressort de tout leadership que choisira le peuple syrien, et nous sommes prêts à la coopération et à lui apporter toutes les facilités possibles », a-t-il conclu/
La Russie, alliée numéro un, du régime d’Assad, n’a pour l’instant pas réagi
Pour le moment, il n’ya pas eu un communiqué, pas un mot des autorités russes sur la situation en Syrie. Les dernières images officielles du Kremlin sont celles de Vladimir Poutine à Minsk vendredi aux côtés du président biélorusse Alexandre Loukachenko.
Le pouvoir russe ne réagit jamais à chaud, mais il y a dans l’immédiat deux types d’enjeux pour le Kremlin. Celui des deux bases militaires russes, la navale à Tartous et l’aérienne à Hmeimim. Au-delà des hommes et du matériel qui peuvent encore s’y trouver et de la question de leur évacuation qui se pose désormais, ces bases sont, disent la plupart des experts, des points de ravitaillement essentiels aux opérations militaires russes en Libye, au Sahel et en République centrafricaine. La question de leur avenir est aujourd hui majeure pour la Russie.
L’autre enjeu, c’est l’image de Moscou comme protecteur fiable et le prestige qu’elle pensait avoir retiré de son intervention en Syrie en se projetant au-delà de son espace régional, comme une puissance capable de changer les rapports de force partout dans le monde. Cela intervient enfin à un moment particulièrement sensible, celui où Donald Trump veut amener la Russie à négocier pour l’Ukraine.
Le chef des forces kurdes salue le moment « historique » de la chute d’Assad
Le commandant en chef des Forces démocratiques syriennes, coalition dominée par des combattants kurdes, a salué ce dimanche un moment « historique » vécu par les Syriens avec la chute de el-Assad. « Nous vivons en Syrie des instants historiques en étant témoin de la chute du régime dictatorial à Damas », a annoncé dans un communiqué le commandant Mazloum Abdi. « Ce changement est une opportunité pour construire une nouvelle Syrie fondée sur la démocratie et la justice, qui garantit les droits de tous les Syriens », a-t-il ajouté.
Des scènes de liesse un peu partout dans le pays
Un peu partout dans le pays les Syriens célèbrent la chute du régime de Bachar. Sur les réseaux sociaux de nombreuses vidéos montrent des Syriens déboulonnant des statues d’Hafez el-Assad dans les grandes villes du pays.
Source : RFI
Légende photo : Bachar el-Assad aurait fui la Syrie.
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