Village d’Ahoué (Brofodoumé) – La chefferie tiraillée par une grave crise, un préfet impliqué

Le paisible village d’Ahoué, dans la sous-préfecture de Brofodoumé, au Sud de la Côte d’Ivoire, situé à 47mn d’Abidjan, la capitale économique ivoirienne, passe aujourd’hui par des moments difficiles. Et pour cause : la grave crise qu’il vit du fait d’un de ses fils, en l’occurrence, M. Pierre Gnamou Angoran, préfet de Kouto, par ailleurs chef de la génération Mounan. Ce dernier se débat pour régenter la vie des populations d’Ahoué par personnes interposées. Pour ce faire, il entend imposer ses hommes à la tête de la chefferie du village.

Pour la petite histoire, il est important de noter, à en croire des habitants du village, que, depuis un certain temps, le tout puissant chef de la génération Mounan- génération au pouvoir à Ahoué- conteste vertement l’autorité du chef du village, Nanan Pacôme Yathé (médecin gynécologue en service à San Pedro), désigné par les membres de sa génération en 2018 et adoubé par l’ensemble des différentes franges de la société d’Ahoué à la suite d’une consultation populaire qui a débouché sur sa confirmation par un arrêté préfectoral en juin 2019.

Le chef de la génération Mounan, Pierre Gnamou Angoran, en conflit ouvert avec le chef de village, Nanan Pacôme Yathé, a donc fait des pieds et des mains pour destituer, au niveau de la génération au pouvoir, le chef de la catégorie M’Bréchoué, M. Paulin Mondon, et ses 6 porte-canne. Lesquels, selon la tradition, nous confient nos sources introduites auprès des arcanes du pouvoir, sont les seuls habilités à désigner le chef du village.

Le chef de la génération Mounan, un préfet, à la manœuvre

 Dans son entêtement à coûte que coûte imposer un homme lige à la tête de la chefferie villageoise d’Ahoué, qu’il pourra, de ce fait, manipuler à souhait une fois arrivé à ses fins, M. Angoran, soutiennent les mêmes sources, a enclenché un processus de destitution du chef des M’Bréchoué et ses porte-canne.

La cérémonie de destitution de ces autorités villageoises qu’il a suscitée a eu lieu, le 6 mai 2024, sous haute surveillance du CCDO (unité nationale de sécurité mixte) auquel il a fait appel pour imposer, dit-on, la terreur. Toutefois, cette manifestation a été organisée sans l’autorisation (ce qui est un préalable) du sous-préfet de Brofodoumé, M. Mohamed Lamine Dosso, dont le village Ahoué fait partie du territoire de compétence.

Toujours à l’initiative du chef de la génération Mouna, les M’Bréchoué ont entrepris, le 2 juin 2024, de destituer le chef du village légitime, Nanan Pacôme Yathé, pour le remplacer par  M. Maurice Bakary Amoussan comme le nouveau chef du village. Cependant, nos sources sont formelles : celui qui fut ainsi promu chef du village d’Ahoué se trouve être le délégué départemental du PDCI-RDA d’Anyama. Pourtant la loi est très claire là-dessus : les chefs de village ne peuvent être des militants politiques actifs.

La partition du préfet d’Abidjan pour calmer le jeu

 Informé de ce qui se passe à Ahoué et en vue de rétablir l’ordre et la quiétude, le préfet de région, préfet du département d’Abidjan, M. Andjou Koua, a convoqué à ses bureaux à Abidjan-Plateau, le vendredi 7 juin 2024, les parties antagonistes dans l’optique de les entendre et clarifier la situation.

Nos sources attestent que le préfet Andjou Koua, après avoir pris langue avec ses hôtes et écouté religieusement leurs arguments, a très vite tranché en faveur de la légitimité. Ainsi a-t-il indiqué que, jusqu’à preuve du contraire, c’est le chef Nanan Pacôme Yathé qui dispose de l’arrêté préfectoral faisant de lui le chef légitime du village d’Ahoué. Et que, de ce fait, l’on doit le laisser en toute tranquillité exercer ses charges pour le bien de ses administrés.

Par ailleurs, M. Andjou Koua, poursuivent nos sources, a recommandé aux adversaires de Nanan Pacôme Yathé de consigner dans un document à lui faire parvenir, tout ce qui est reproché au chef du village. Afin qu’il puisse froidement analyser ces griefs formulés. La conciliation du préfet d’Abidjan n’a toutefois pas arrêté les velléités de déstabilisation portées par le chef de la génération Mounan, Pierre Gnamou Angoran, par ailleurs, préfet de Kouto. Ce dernier a quand même réussi à obtenir la démission en cascade d’une bonne partie des notables du village. Ces personnes, tous membres de la génération Mounan, auraient subi une énorme pression doublée de chantage et de menaces de la part de M. Angoran qui a fini par les faire craquer, avons-nous appris.

La quiétude fortement menacée à Ahoué

 Conséquence ? Depuis lors, la quiétude du village est fortement menacée. Et résultat des courses, aujourd’hui, Pierre Gnamou Angoran et Nanan Pacôme Yathé se regardent, regrettent nos sources, en chiens de faïence. Le contact est donc rompu entre les deux frères. Surtout que le premier cité n’entend point laisser prospérer les recommandations du préfet d’Abidjan. Disant à qui veut l’entendre qu’il est de par sa position (de préfet) au-dessus d’un chef de village et aussi d’un sous-préfet. Raison pour laquelle il n’a pas jugé utile, en son temps utile, de consulter le sous-préfet de Brofodoumé avant d’avoir recours au CCDO pour faire quadriller le village au cours de la cérémonie de destitution du chef des M’Bréchoué et ses 6 porte-canne.

Il est important de souligner que le jour de la décision prise par le préfet d’Abidjan, tout le village était en fête. « C’était la liesse populaire. Toutes les artères du village étaient prises d’assaut par les populations qui voyaient en cette décision la fin de la guéguerre entre les frères adversaires », nous a confié un villageois qui a préféré garder l’anonymat. Contacté, Nanan Pacôme Yathé a dit s’en remettre aux recommandations du préfet d’Abidjan.

Quant au chef de la génération Mounan, Pierre Gnamou Angoran, préfet de Kouto, nos tentatives pour avoir sa réaction relativement à cette grave crise à Ahoué qui s’étaient avérées infructueuses, le jeudi 14 juin, ont été payantes, le lendemain, ce vendredi 15 juin 2024. Alors que nous agissons, en toute impartialité, dans cette affaire, il nous a répondu, par SMS (message électronique), en ces termes : « Puisque vous dites que je suis accusé d’être l’instigateur d’une crise de chefferie, adressez-moi une convocation via le Procureur de la République. Ce faisant, vous obtiendrez des explications de ma part ! Merci ».

Marcellin Boguy 

 Légende photo : Le siège de la chefferie du village d’Ahoué.

 

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