Kalou Bonaventure, ex-international ivoirien de football : « Il y a des problèmes de personnes dans le milieu de l’arbitrage ivoirien »

L’ONG confrères journalistes de Côte d’Ivoire (CJCI) recevait récemment dans le cadre de son « Débat ONG CJCI », l’ancien international de football, Kalou Bonaventure, par ailleurs, l’un des responsables de la Fédération ivoirienne de football (FIF) et précisément président de la commission centrale des arbitres de la FIF. Le thème du débat était « Arbitrage dans le football en Côte d’Ivoire :

quel état des lieux entre crises et soupçons de corruption ? ». Nous vous proposons la première partie des échanges de Kalou Bonaventure avec la presse.

Vous avez été  nommé président de la commission centrale des arbitres,  c’est un peu comme un ministre des Affaires étrangères qui ne connait pas le monde de la diplomatie.  Est-ce que le travail que vous allez produire sera irréprochable ?

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L’arbitrage est une branche du football. Il fait partie intégrante du football. Je ne vois pas en quoi, cela est différent du football pour que je n’y comprenne rien. On n’a pas besoin de faire Havard pour diriger une commission des arbitres. Ça reste de l’humain, il faut savoir gérer les gens. Il faut savoir manager. C’est totalement pareil. Je suis un footballeur qui peut président de la commission des arbitres parce que c’est une partie du football.

C’est quand même un autre monde. Même si vous avez été un footballeur professionnel, c’est quand même osé d’accepter d’assumer cette fonction. N’avez-vous pas d’appréhension ? Quels étaient les défis à relever ? N’aviez-vous pas peur d’avoir à affronter les gens du milieu ?

C’est vrai que le footballeur est différent de l’arbitre mais un footballeur doit connaître les règles du football, un peu comme l’arbitre. Diriger cette commission, c’était un peu osé de l’accepter. Le président a sondé ses hommes et il s’est dit que j’étais celui qui est capable de mener cette mission parce que je ne suis pas un président de club parce que c’était aussi l’une des conditions. Je n’ai aucune peur d’affronter les gens du milieu, même pas d’appréhensions. Il y a toujours des problèmes de personnes dans le milieu de l’arbitrage ivoirien. Justement, il fallait quelqu’un de neutre et de neuf pour pouvoir ramener certaines positions qui étaient totalement à l’opposé.

A ce jour, quel est le nombre d’arbitres féminines en Côte d’Ivoire et à quel niveau officient-elles ?

Il y a quatre ou cinq qui sont des arbitres internationales qu’on utilise en Ligue 1 et d’autres en Ligue 2. Elles nous ont donné énormément de satisfaction ces jeunes dames. Vraiment, elles sont à encourager. Sur tous les matchs qu’elles ont fait, ça été des félicitations. On va continuer avec elles et les accompagner le plus loin possible parce que je fais la promotion du genre.

En vous nommant président de la Commission centrale des arbitres, quelle a été la feuille de route qui vous a été confiée par le président Yacine Idriss Diallo ? Et 7 mois après, quel est l’état des lieux ?

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Ma feuille de route est de pacifier le milieu parce que la commission avait beaucoup de problèmes de personnes. C’était d’apaiser le milieu et essayer de rapprocher les différentes positions quelque fois avec succès, d’autres fois pas. Pour moi, les arbitres doivent se parler et regarder dans la même direction. De toutes les façons, les projets et les ambitions sont les mêmes c’est-à-dire avoir un bon arbitrage au niveau international.

Quels sont tes hommes clés de la gestion de l’arbitrage ivoirien ? Et quelle est la mission de chacun d’eux ?

Il y  a Yéo Songuifolo qui m’épaule dans la mission en tant que vice-président. Il est aussi là pour le renforcement des capacités. Parce qu’il est ancien arbitre, instructeur FIFA. Il y a également Sharaf qui est chargé de tout ce qui est planification et désignation des arbitres. Ce sont des personnes qui ont d’énormes compétences.

Aujourd’hui quel est l’état des lieux du monde arbitral quand on voit que nos arbitres ne sont pratiquement pas aux grands rendez-vous du football africain et mondial ?

C’est votre rôle de faire des investigations. Depuis le début de la saison, les arbitres ivoiriens sont utilisés régulièrement dans toutes les compétitions de la CAF. Pendant qu’on y est, il y a trois quatuors ivoiriens qui sont désignés pour officier dans les compétions Champion’s League et CAF, un est présentement sur le regroupement des U20 au Caire. L’arbitrage ivoirien est sorti grandi du CHAN 2022 avec un arbitre assistant en final de cette compétition. Ce sont des résultats qui méritent d’être signalés. Ces quatre arbitres pour la Champion’s League sont Traoré Kalilou, Ngôh Adou, Nour Ouattara, Buro Kouassi. Pour la coupe CAF, on a Bléhi Patrick, Kouabenan Prosper, Bamba Kalilou, Soro Tuoniféré. Donc, on ne peut pas dire que les arbitres ivoiriens ne sont pas conviés aux grandes compétitions.

On parle de Ligue de football professionnel, est-ce que la FIF sur exigence de la CCA filme tous les matchs de Ligue 1 et Ligue 2 pour apprécier l’attitude des arbitres? Si non, sur quelles bases la CCA épingle-t-elle les arbitres fautifs ?

Les matchs de Ligue 1 sont tous filmés. Tous ceux qui ont été épinglés , pour la plupart, c’est sur des matchs de Ligue 1. Pour le moment, je ne pense pas que la FIF ait les moyens techniques de faire filmer tous les matchs de Ligue 2 et D3. En général, ce sont les présidents de club ou les clubs eux-mêmes qui font filmer leurs matchs et quand il y a des décisions un peu tendancieuses, on examine et on essaie de prendre des décisions adéquates.

Par exemple, il y a un président de club qui a tempêté et quand il a envoyé la vidéo de l’action, il n’y avait pas de quoi s’inquiéter. Donc il faut que les uns et les autres arrêtent de façon systématique que lorsqu’on perd un match, ce sont les arbitres. Je ne dis pas que tous les arbitres sont de très haut niveau mais il y a cette part d’humain dans l’arbitrage qu’il faut prendre en compte.

Quand ce sont des erreurs manifestes qui changent le cours d’un match, on prend des décisions qui s’imposent. Parce que c’est aussi le rôle de la CCA. La CCA fait tout ce qui est en son pouvoir pour améliorer l’arbitrage ivoirien. En même temps, il ne faudrait pas que les présidents ne cachent pas l’incompétence de leurs clubs en toujours criant au loup même quand ça n’a pas lieu d’être.

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Vous remplacez Mme Athacou Agathe à la tête de la Commission centrale des arbitres. Quel est l’état des lieux, en termes de cohésion au sein de cette corporation ?

Il y a quelque temps nous avons fait l’état des lieux à la Bourse du travail à Treichville-Abidjan où toutes les entités en charge de l’arbitrage en Côte d’Ivoire étaient présentes. Il n’y a pas péril en la demeure. Juste quelques petits problèmes d’incompréhension. Nous sommes en train de résorber ces problèmes petit à petit pour nous concentrer sur le renforcement de capacités des arbitres. Finalement, ce qui est le plus important, ce sont les prestations de nos jeunes gens sur les différents championnats.

Quelle est votre politique pour des arbitres de qualité en Côte d’Ivoire ?

C’est la supervision, le renforcement de capacités. Il n’y a que ça pour que les arbitres gagnent en qualité et soient bons sur tous nos stades. En fin d’année, il y aura des évaluations. Sur la politique du président Idriss c’est de choisir 10 ou 11 quatuors qui seront des arbitres rémunérés. Mais avant d’y arriver, il faut de la supervision pour garder la crème de la crème de notre arbitrage.

Beaucoup de dirigeants de club grognent depuis le début des différents championnats. Etes-vous informé de tout ? Et quelles solutions proposez-vous en lien avec vos hommes qui sont très critiqués ? Par ailleurs, avez-vous eu les échos du match Yakro FC – ISCA à Yamoussoukro, samedi dernier ? Il semble que c’est scandaleux…

Bien sûr que je suis informé et en réunion du comité exécutif, je l’ai dit à M. Bictogo, président de la Ligue, que s’il  y a des corrompus, c’est qu’il y a des corrupteurs. Il faut que chacun balaie devant sa porte. Les présidents de club sont très prompts à vilipender les arbitres. Nous en prenons note mais il faut aussi que certains arrêtent d’essayer de corrompre les arbitres. Comme le dit l’adage, le coupeur de tête n’aime pas qu’on passe derrière lui avec une machette. Si on veut endiguer ce fléau, il faut qu’on travail main dans la main. 

Pour le match Yakro FC – ISCA, ça reste des spéculations. J’ai vu une image et je n’ai pas encore tout les contours de cette affaire. S’il y a d’autres éléments probants qui peuvent nous permettre de mettre l’arbitre devant les faits, je suis preneur. Mais pour l’instant, ce ne sont que des spéculations, il n’y a pas d’éléments solides pour pouvoir prendre une décision qui s’impose.

Début janvier 2023, vous avez fait le bilan de la première phase des championnats nationaux de Ligue 1, Ligue 2, de la Division 3. Il se trouve que la Commission a épinglé huit arbitres pour faiblesse technique, indiscipline, mauvaise interprétation et application des lois de jeu etc. Comment comptez-vous pallier cela concrètement ?

Début janvier, nous avons fait l’état des lieux. Nous avons fait une sorte de bilan. Ces huit arbitres qui ont été épinglés attendent toujours leur sentence. Leur cas est toujours en train d’être examiné par la commission de discipline. Pour l’instant, ils ne sont pas désignés sur les matchs en attendant que les sanctions tombent.

Avez-vous un système d’évaluation ou de contrôle des arbitres au niveau de votre commission ? Si oui, quel en est le processus ?

Le système de validation, il est simple. Il y a des superviseurs qui vont suivre les matchs et les arbitres sont notés après chaque journée et en fin de saison, on fait une évaluation générale pour voir le niveau de chacun.

Début janvier, vous avez fait le bilan de la première phase des championnats nationaux de Ligue 1, Ligue 2, de la Division 3. Il se trouve que la Commission a épinglé huit arbitres pour faiblesse technique, indiscipline, mauvaise interprétation et application des lois de jeu etc. Comment comptez-vous pallier cela concrètement ?

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Pour l’instant, la commission d’arbitrage n’a pas encore donné de sanctions qui s’imposent. Ils sont pour l’instant mis de côté, ils ne peuvent pas officier. On attend qu’une autre décision soit prise pour eux pour qu’ils purgent leur sanction ou qu’ils soient réintégrés.

Il a été question de la suspension de huit arbitres au terme de la première phase du championnat. Ces arbitres sont suspendus pour combien de matchs ?

La sanction n’a pas encore été donnée. Le dossier est encore entre les mains de la commission d’arbitrage. C’est elle adossée aux textes qui pourra prendre la sanction à la hauteur des délits commis.

Retranscrite par Joël Dally

(Demain, la suite)

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