Arts plastiques / Exposition « Toi et moi » à la galerie Kynome – Quand la mal urbanisation dérange les consciences

Le plasticien Justin Oussou célèbre, cette année, ses 35 ans de carrière dans les arts plastiques. Et, pour la célébration méritée de cet anniversaire, le temps d’une exposition, l’artiste-enseignant pose ses valises, un mois durant (du jeudi 18 avril au vendredi 17 mai 2024), à la galerie Kynome sise à Cocody-II-Plateaux-Vallons (Abidjan). En prélude à cette exposition intitulée à dessein « Toi et moi » et qui interroge sur les problématiques liées à l’urbanisation et aux questions ayant trait à l’environnement, Justin Oussou était face à la presse, samedi 13 avril dernier, à la galerie hôte de son exposition d’une vingtaine de tableaux.

« Le thème ‘’Toi et moi’’ est un thème prémonitoire dans la mesure où nous avons commencé cette aventure depuis la fin de l’année dernière, disons entre novembre et décembre 2023. Et nous avons continué notre chemin. C’est un thème d’une actualité brûlante dans la mesure où nous parlons d’urbanisation, de logement, de bidonvilles, etc. Et il se trouve que l’Etat a commencé à démolir les habitations de pauvres citoyens. Vous savez aussi que l’artiste est le témoin de son temps ; il est le témoin de ses contemporains. L’artiste est celui-là même qui a l’âme d’un enfant, qui dit tout haut ce que les autres disent tout bas. Il est quand même l’avocat des sans-voix. Donc, en tant qu’artistes, nous ne pouvons pas rester indifférents, insensibles face à ce type de dérives, au comportement de nos autorités que certains traduiraient, qualifieraient de bandit parce que, comme le dit Assalé Tiémoko, nous sommes tous ben danger en Côte d’Ivoire. Comment, dans un pays, quelqu’un qui a son ACD (Arrêté de construction définitive), qui paie ses impôts peut-il voir sa maison être démolie sous ses yeux ? A quoi servent alors ces documents administratifs ? C’est-à-dire que l’on paie ses impôts et, un beau matin, on envoie des bulldozers venir casser votre maison. C’est à la limite du banditisme d’Etat. En tant qu’artistes, nous sommes un peu effrayés. Et vous savez, comme l’a dit Emmanuel Kant, c’est le chaos du sens. L’artiste ne peut pas être indifférent face à ce genre d’agissements. Donc je m’interroge à travers notamment une de mes toiles que j’ai baptisée : « Où veux-tu que j’aille ? ».

« C’est une question directement posée à l’Etat de Côte d’Ivoire. J’ai mon ACD, je paie mes impôts et tu viens casser ma maison. Alors où veux-tu que j’aille ? En tant qu’artiste, je suis en droit de me poser une telle question. En gros, c’est le cadre précis de l’exposition-anniversaire de mes 35 ans de carrière. Mais cette exposition s’inscrit dans le grand thème de l’environnement, de la pollution de l’air, du mal logement, de la pollution des mers, de la pollution des cours d’eau… Même la ville dans laquelle nous vivons est polluée. Donc nous essayons, à travers nos peintures, de sensibiliser l’Etat lui-même pour trouver des approches de solution. L’artiste est quelqu’un de versatile. C’est pourquoi l’Etat lui-même s’en méfie. Parce l’artiste, qui n’est pas un homme politique, ne peut pas suivre aveuglément. Et dire qu’il ne doit pas intervenir dans le débat politique, c’est nier son existence. C’est pourquoi d’ailleurs l’artiste ne doit pas avoir de chapelle politique pour que ses prises de position soient crédibles. L’artiste doit alors se mettre au-dessus de la mêlée politique. L’artiste, comme vous le savez, n’intellectualise pas. L’artiste crée. Et en créant, c’est la vie elle-même qui s’exprime à travers ses œuvres », a-t-il longuement expliqué.

Avant, le plasticien Pascal Konan, promoteur-coorganisateur de l’exposition à travers la structure Ellasse, et Raymond Achi, propriétaire de la galerie hôte, ont situé le contexte de l’évènement. En donnant rendez-vous au grand public ce jeudi (18 avril), à partir de 18h, pour le vernissage de l’exposition « Toi et moi ».

Marcellin Boguy

Légende photo : L’artiste-plasticien Justin Oussou lors de la conférence de presse.

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