Guerre Russie-Ukraine / Pourquoi des pays africains s’engagent pour une mission de paix à Moscou et Kiev

C’est le chef de l’Etat sud-africain Cyril Ramaphosa, dont la proximité avec la Russie pour des raisons historiques et à cause des BRICS, qui a fait cette annonce, le mardi 16 mai 2023. Six pays africains, à savoir, la Zambie, du Sénégal, du Congo-Brazzaville, de l’Ouganda, de l’Égypte et de l’Afrique du Sud ont décidé de conduire une mission de paix et de bons offices à Kiev et Moscou pour parvenir à une solution pacifique à la guerre qui oppose l’Ukraine à la Russie depuis février 2022.

La délégation menée par les chefs d’État de ces six pays africains se rendra donc dans les capitales des deux pays en conflit pour tenter de « trouver une solution au conflit dévastateur », a soutenu Cyril Ramaphosa devant la presse lors de la conférence qu’il a animée au Cap.

Et de préciser que Vladimir Poutine et Volodymyr Zelensky ont « accepté de recevoir la mission et les chefs d’État africains, à Moscou et à Kiev ». « J’ai convenu avec le président Poutine et le président Zelensky de commencer à préparer les engagements avec les chefs d’État africains », a-t-il ajouté.

Le secrétaire général des Nations unies, Antonio Guterres, a été informé du projet de mission de paix africaine « et l’a accueilli favorablement », a précisé Cyril Ramaphosa. Quant à l’Union africaine (UA), également informée de l’initiative, elle apporte son soutien. Son nouveau président en exercice, le Comorien Azali Assoumani, en fonction depuis février 2023, a exprimé son soutien pour une solution pacifique à la guerre en Ukraine.

Divisés relativement à ce conflit, les pays africains ont opté majoritairement pour la neutralité au grand dam des occidentaux qui aimeraient les voir charger la

Russie et soutenir l’Ukraine.

Théâtre de conflits armés de toute acabit et maintenant de terrorisme ardu, les pays africains, mieux que quiconque, connaissent le prix de la paix et de la stabilité.

D’où leur option pour le dialogue et la paix là où d’autres pays, notamment les occidentaux continuent de privilégier la « victoire » militaire d’un camp sur un autre. Principalement selon eux, de l’Ukraine sur la Russie.

Didier Depry       

L’annonce intervient alors que les relations sont tendues entre Pretoria et Washington, suite aux propos de l’ambassadeur américain qui a accusé l’Afrique du Sud d’avoir fourni des armes à la Russie, et que le commandant des forces terrestres sud-africaines est actuellement en visite officielle à Moscou. Avec cette mission, Cyril Ramaphosa espère donc rebattre les cartes.

Les deux leaders avec lesquels j’ai pu m’entretenir, le président Poutine et le président Zelensky, sont d’accords pour recevoir une mission de ces chefs d’États africains à Moscou et à Kiev.

Cyril Ramaphosa, président de l’Afrique du Sud

RFI

Le projet, en discussion depuis des semaines, a connu un coup d’accélération ce week-end, lorsque le président sud-africain s’est entretenu avec ses homologues russe et ukrainien. Selon le chef de l’État, les deux camps ont donné leur accord pour recevoir la visite de cette mission pour la paix. Le président sud-africain espère désormais que ce voyage pourra se faire « dès que possible », bien que les modalités soient encore en discussion, pour décider notamment qui recevra la mission en premier.

D’après la Fondation Brazzaville, qui chapeaute le projet, ces six pays ont été choisis de façon à représenter les différentes vues du continent sur le conflit, avec des pays comme l’Afrique du Sud ou l’Ouganda, qui défendent leurs liens avec la Russie, et d’autres comme la Zambie ou l’Égypte, qui ont voté pour le retrait des troupes russes lors de la dernière résolution de l’ONU.

Côté sud-africain, il n’est pas étonnant que Cyril Ramaphosa se soit engagé dans ce projet, lui dont le discours a toujours été, depuis le début du conflit, de réclamer le dialogue et trouver une solution négociée pour la paix, plutôt que de prendre parti pour un camp. Selon Pretoria, le secrétaire général des Nations Unies et l’Union Africaine auraient accueilli favorablement cette initiative.

► À lire aussi : L’Afrique du Sud confrontée à sa position de neutralité sur la guerre en Ukraine

De nombreuses questions d’organisation en suspens

L’Afrique ne voulait pas rester inactive sur un sujet qui la touche en premier lieu. C’est avec cette volonté que cette mission de paix s’est concrétisée en janvier dans le plus grand secret avec des discussions uniquement entre chefs d’États. Désormais, le plus complexe est le calendrier.

Selon nos informations, Vladimir Poutine aurait proposé qu’elle se déroule en marge du sommet Russie-Afrique fin juillet, les six présidents souhaitent qu’elle se tienne avant, notamment d’ici fin juin, elle est prévue sur quatre jours. La Fondation Brazzaville qui est à l’origine de ce projet indique que la composition de la délégation a du sens avec six États qui ont des positions politiques différentes au sujet de la guerre en Ukraine : soutien à l’un des deux camps ou neutralité.

Si l’Union Africaine a indiqué soutenir cette mission, l’institution et son président en exercice, le chef d’État des Comores, Azali Assoumani ont préféré se mettre en retrait pour ne pas ralentir le processus diplomatique, forcément plus complexe s’il fallait convaincre tous les États du continent. Les obstacles pour la réussite de cette mission de paix sont donc nombreux, le président Cyril Ramaphosa a d’ailleurs indiqué que s’ouvrait désormais la phase des préparatifs.

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